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Questions au gouvernement

Application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution

La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. André Chassaigne. Monsieur le Premier ministre, vous venez d’annoncer le recours à la procédure la plus antidémocratique de notre Constitution – l’article 49, alinéa 3 (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains et du groupe écologiste) – pour empêcher la représentation nationale de débattre et de voter contre le projet de loi travail. C’est la manifestation de l’impuissance d’un gouvernement replié sur lui-même – pour ne pas dire aux abois – qui, à défaut de majorité, préfère user d’un triple coup de force. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe Les Républicains.)
Coup de force contre le monde du travail, qui signe une régression historique du droit du travail par la remise en cause de la protection des salariés.
M. Philippe Meunier. Il ne fallait pas voter Hollande !
M. André Chassaigne. Qui aurait pu imaginer qu’un gouvernement se réclamant de la gauche ose ainsi anéantir notre modèle social, fierté de notre pays ? Mes chers collègues, qui aurait pu imaginer qu’un gouvernement se réclamant de la gauche balaie ainsi d’un revers de main le principe de faveur, grande conquête du Front populaire ?
Coup de force, aussi, contre nos compatriotes. Sept Français sur dix rejettent cette réforme qui porte atteinte aux plus fragiles : nombre d’entre eux l’ont manifesté dans la rue dès le premier jour. Ils sont autant à refuser le recours au 49-3, témoignant ainsi de leur attachement au débat démocratique.
Coup de force, enfin, contre la représentation nationale, privée de son rôle de législateur. Cette représentation nationale a été humiliée, dès hier, par une parodie de débat législatif sans vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe Les Républicains, et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.) Elle vient de recevoir le coup de grâce, cet après-midi. La manœuvre est grossière…
M. Jean-Paul Bacquet. Staline !
M. André Chassaigne. …et symptomatique d’un exécutif à la dérive. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.) Elle vise uniquement à empêcher le Parlement, majoritairement contre ce texte, de s’y opposer.
Monsieur le Premier ministre, les députés du Front de gauche et, sans doute, les députés siégeant sur d’autres bancs vous demandent solennellement de renouer avec les valeurs de gauche et d’écouter les voix du peuple. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président Chassaigne, la Constitution est là. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe Les Républicains.)
Mme Jacqueline Fraysse et M. Nicolas Sansu. Coup d’État permanent !
M. Manuel Valls, Premier ministre. L’un de ses articles permet d’engager la responsabilité du Gouvernement. Je suis d’ailleurs surpris que certains députés de l’opposition, qui se réclament souvent des fondateurs de la Constitution, aient pu applaudir cette mise en cause de l’un de ses articles (Protestations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains), qui a déjà été appliqué à de nombreuses reprises.
J’ai de bons souvenirs : cet article a été plus particulièrement utilisé par Michel Rocard, quand il s’agissait d’instaurer la CSG. À l’époque, il y avait une majorité de gauche, mais pas une majorité socialiste ; votre famille politique avait alors refusé de voter une réforme sur laquelle personne n’est revenu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. Yves Censi. Le 49-3 n’a jamais été utilisé par Nicolas Sarkozy !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Oui, monsieur Chassaigne, j’assume parfaitement cet engagement, car ce texte est bon pour les entreprises et pour les salariés. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
M. Claude Goasguen. Hors sujet !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Il donne de nouveaux droits aux salariés. Dites clairement, monsieur Chassaigne, que vous vous opposez à la création du compte personnel d’activité, qui accompagnera les salariés tout au long de leur vie.
Oui, monsieur Chassaigne, je le regrette : ce texte, utile pour les entreprises et pour les salariés, rencontre des oppositions venant de toutes parts,…
M. Nicolas Sansu. Des oppositions venant des Français !
M. Manuel Valls, Premier ministre. …pour des raisons contradictoires. Vous voulez défendre les salariés, tandis que l’opposition veut mettre en cause les droits des syndicats. Ma responsabilité, notre responsabilité est d’avancer et de faire en sorte que ce texte soit adopté. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. Nicolas Sansu. Lamentable !

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