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Questions au gouvernement

Crise agricole

Monsieur le ministre de l’agriculture, la crise que subissent nos agriculteurs est d’une extrême gravité comme le montrent les terribles tragédies qu’elle peut engendrer. Elle ne doit pas servir de prétexte à des affrontements politiciens où chacun se renvoie la responsabilité de la situation. Notre groupe a voté la loi marquant une indispensable orientation vers l’agroécologie et soutenu les mesures d’accompagnement des éleveurs. Nous soutenons aujourd’hui votre volonté de faire bouger l’Europe en rétablissant des outils de régulation.
Mais nous savons bien que toute solution durable passe par une réorientation de la politique agricole commune en sortant les produits agricoles des dogmes de la libre concurrence. La recherche sans fin de la compétitivité massacrera autant nos exploitations familiales que la qualité de nos productions et nos territoires ruraux. Il faut garantir, et dans la durée, des prix d’achat à la production rémunérant le travail paysan. Cela ne peut pas se faire simplement par des négociations avec les entreprises de la distribution et de la transformation, et pas davantage par une contractualisation qui se révèle toujours inéquitable.
Voilà pourquoi nous réclamons, avec constance, le rétablissement de mécanismes de garantie des prix et d’encadrement des marges, comme pouvait l’être jusqu’en 1986 le coefficient multiplicateur. La situation impose de fixer des prix plancher et de maîtriser les marges dans chaque filière ; elle nécessite de ne plus tirer vers le bas le prix des produits alimentaires pour masquer la baisse des revenus des consommateurs.
Dès lors, monsieur le ministre, quelle est votre action concrète au sein de l’Union européenne pour sortir l’agriculture des règles de la concurrence et faire admettre qu’un produit alimentaire n’est pas une marchandise comme une autre ? Quelles mesures législatives concrètes êtes-vous prêt à présenter pour garantir des prix d’achat aux agriculteurs, et dans quels délais ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, je connais la passion qui est la vôtre et la manière dont vous abordez régulièrement dans les débats la question agricole.
L’agriculture n’est pas, vous avez raison, un secteur qui peut accepter de la même manière que d’autres les règles de l’économie de marché. On sait que plusieurs théories, qui ne datent pas d’hier, expliquent les effets de la variation des prix sur la production agricole et sur la consommation alimentaire, théories qui prouvent qu’il s’agit d’un secteur où il est indispensable que jouent des mécanismes supplémentaires.
Depuis quelques années, au niveau européen, on a cherché à rapprocher l’agriculture des logiques de l’économie de marché. C’est indéniable. Cela s’est fait par étapes successives : il y a eu la réforme Mac Sharry, puis d’autres, la dernière en date étant celle du bilan de santé en 2008 avec un certain nombre de décisions qui furent prises alors et sur lesquelles je ne reviens pas. Que se passe-t-il aujourd’hui ? Sur le seul sujet du lait, il apparaît qu’il y a un emballement général de toute la production laitière, qui ne cesse d’augmenter alors que l’essor de la demande mondiale est loin d’être à la hauteur de ce que les acteurs économiques avaient prétendument anticipé. Il faut donc revenir à une coopération, à une coordination au niveau européen, et cesser d’alimenter la concurrence entre pays européens ou entre entreprises européennes. Car, au bout du compte, et vous l’avez parfaitement identifié, ce sont les producteurs, en l’espèce les éleveurs, qui payent le prix de la stratégie actuelle.
Vous me demandez quelle est mon action concrète au niveau européen : hier soir, le commissaire européen a pris l’engagement d’envoyer un courrier à tous les ministres concernés pour qu’ils lui remettent leurs propositions ;…
M. Philippe Le Ray. Enfin !
M. Stéphane Le Foll, ministre. … j’ai déposé un mémorandum comportant un certain nombre de mesures.
M. Christian Jacob. Vous n’avez rien fait, rien préparé, rien anticipé !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Aujourd’hui, voilà une Europe qui bouge, une Europe qui doit changer pour intégrer la contrainte du marché et surtout apporter une aide aux agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, sur plusieurs bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur quelques bancs du groupe écologiste – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

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