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Questions au gouvernement

Optimisation et fraude fiscales

Une fois de plus, avec les « Paradise papers », nous sont révélées les pratiques opaques, souvent légales d’ailleurs, d’une oligarchie qui depuis des décennies s’enrichit sur le dos des citoyens. C’est un pillage organisé et c’est un préjudice grave pour l’intérêt général, celui justement que nous sommes chargés de défendre ici. Le préjudice pour la France est de 20 milliards d’euros du fait de l’optimisation fiscale, de 80 milliards du fait de l’évasion fiscale. C’est insupportable, insupportable en regard des conditions de vie de nos concitoyens, insupportable en regard des 15 milliards d’euros d’économies prévues en matière de santé, et cela fait système en regard des 76 milliards de déficit !
Les réponses apportées hier par M. Darmanin à Adrien Quatennens ou lundi par M. Le Maire montrent que la question n’est pas prise à bras-le-corps. Face à une mondialisation sauvage et hostile aux plus faibles, c’est un combat politique qu’il faut mener. Il ne peut se réduire à des sermons, car il n’est pas affaire ici que de morale : il faut reprendre la main qui a été laissée à la finance – c’est bien cela dont il s’agit !
L’année dernière, notre assemblée avait adopté à une très large majorité la proposition de résolution européenne du groupe communiste appelant à l’institution d’une conférence des parties – COP – de la finance mondiale, l’harmonisation et la justice fiscales. La nécessité de justice souligne en effet l’urgence d’une grande mobilisation internationale des États, des lanceurs d’alertes, des journalistes, des intellectuels, des associations, à l’instar de la COP21 sur le climat. Or, aujourd’hui, aucune initiative visant à s’attaquer au cœur du système n’a encore été prise par le Gouvernement. Pourtant les solutions existent : il suffit de se référer au texte de la résolution.
Monsieur le ministre, à quand une liste noire des paradis fiscaux – une liste complète ? À quand des moyens de contrôle, à quand l’initiative par la France de la réunion d’une COP fiscale, à quand la fin du verrou de Bercy ? Je fais le pari que tout recul sur ces décisions nous amènera à vous reposer très vite la question lors du prochain scandale (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs des groupes FI et NG.)
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la députée, vous avez raison : c’est insupportable. Au moment où notre pays est engagé, collectivement, dans un effort pour rétablir ses finances publiques, plus que jamais la fraude fiscale, l’évasion fiscale et les pratiques d’optimisation fiscale que vous avez évoquées, et qui sont parfois proches de l’abus, doivent être combattues avec force, tant en France que sur la scène internationale. La France compte d’ailleurs parmi les pays les plus engagés dans ce combat. Le Gouvernement n’a pas attendu la révélation par un grand quotidien des « Paradise papers » pour agir.
Oui, le combat est politique, et il passe en grande partie par l’Union européenne, dont il vous est arrivé, ou en tout cas à certains députés siégeant dans la même partie que vous de l’hémicycle, d’interroger la présence dans l’hémicycle. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)
M. André Chassaigne. Pas nous !
M. Stéphane Peu. C’est nul ! C’est de la provocation !
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État. Le combat passe par la scène internationale, parce qu’il a lieu, pour une grande part, à Bruxelles. C’est pourquoi le ministre de l’économie et des finances participait hier à la réunion des ministres des finances de l’Union européenne. Il y a formulé des propositions.
Premièrement, il faut accroître les échanges d’informations entre administrations fiscales et sanctionner les pays qui ne coopéreraient pas en prenant des contre-mesures fortes, pouvant aller jusqu’à conditionner leur accès à certaines institutions financières internationales.
Deuxièmement, il faut rendre obligatoire sur le plan international et européen la publication des montages fiscaux.
Troisièmement, il faut désigner les pays qui ne joueraient pas le jeu. Nous voulons que l’Union européenne se dote d’une liste de juridictions non coopératives d’ici à la fin de l’année. Des contre-mesures pourront être prises.
Mme Elsa Faucillon. Et la COP fiscale ?
M. Stéphane Peu. Et le verrou de Bercy ?
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État. Je le répète : le combat se mène sur la scène internationale, et aussi sur la scène nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
M. André Chassaigne. Vous ne répondez pas à la question. C’est inacceptable !

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