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Questions au gouvernement

Féminicides : l’engagement du Gouvernement doit être déterminé et efficace

Frappées, humiliées, les femmes victimes de violences conjugales vivent un calvaire.

Comme nombre d’élus, je les reçois lors de mes permanences. Chaque fois, il faut, mot après mot, libérer leur parole. Rien n’est simple. Le sentiment de culpabilité, aiguisé par leur compagnon et la société, la peur de se retrouver sans ressources avec les enfants, et la proximité de la famille du mari violent sont autant d’obstacles à surmonter pour la victime.

Chaque fois, je les incite à porter plainte mais, sans l’assurance d’une protection immédiate, le courage ne suffit pas toujours à ces femmes pour accomplir cette démarche.

Des associations les accompagnent, mais la loi est nécessaire pour garantir aux femmes victimes de violences protection et droits.

En 2010, la loi contre toutes les violences faites aux femmes comportait une avancée majeure : l’instauration de l’ordonnance de protection, permettant d’éloigner le conjoint violent.

La loi visant à agir contre les violences au sein de la famille, dite loi Pradié, votée en 2019, renforçait ce dispositif en fixant au juge, un délai de six jours, contre trente auparavant, pour délivrer l’ordonnance. Cette disposition répondait à l’exigence de protéger, en urgence, la victime.

Alors que la loi avait été adoptée à l’Assemblée nationale à l’unanimité, le décret du 27 mai dernier contrevient, hélas, à l’objectif de celle-ci…

M. Fabien Di Filippo. Bravo, voilà la vérité !

Mme Marie-George Buffet. …en enjoignant à la victime de signifier, par huissier de justice, à son agresseur la date de l’audience et de remettre l’assignation au greffe dans un délai de vingt-quatre heures.

M. Jean-Christophe Lagarde. Ridicule !

Mme Marie-George Buffet. J’apprends que ce délai pourrait être porté à quarante-huit heures.

Madame la garde des sceaux, cette année, quarante-quatre femmes sont mortes sous les coups de leurs conjoints. Face aux féminicides, l’engagement de la représentation nationale et du Gouvernement doit être déterminé et efficace.

Pouvez-vous nous préciser le contenu du décret rectificatif qui doit être pris, ainsi que l’avis des associations sur celui-ci ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI, sur plusieurs bancs des groupes LR et UDI-I, ainsi que sur quelques bancs des groupes MODEM et EDS.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la ministre, en réponse aux préoccupations dont vous m’aviez fait part à ce sujet, je vous avais apporté des précisions. Je vous avais indiqué mon souhait de poursuivre la concertation avec les associations qui s’étaient ému des difficultés qui pourraient résulter de la rédaction du décret. C’est ce qui a été fait ; plusieurs rencontres ont eu lieu, et, ce matin même, s’est tenu un comité national de pilotage sur l’ordonnance de protection, réunissant, sous la présidence d’Ernestine Ronai, des avocats, des associations d’aide aux victimes, et des magistrats.

M. Aurélien Pradié. Mais aucun parlementaire !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Ce comité a précisé les différentes étapes de la procédure prévues dans le décret.

En conséquence, nous avons modifié celui-ci, en assouplissant le délai d’assignation du défendeur pour le porter à quarante-huit heures, en écartant toute sanction procédurale couperet, et en garantissant la gratuité de la procédure pour la victime. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Ces modifications nous permettront de respecter le contradictoire mais surtout – c’est là ma seule obsession – d’assurer l’efficacité de la procédure pour les femmes victimes de violences. C’est le seul point sur lequel nous nous retrouvons toujours. C’est aussi celui sur lequel nous travaillons avec les juridictions ainsi qu’avec l’ensemble des partenaires.

Ce matin, Ernestine Ronai insistait sur deux mots : « partenariat » et « égalité sur l’ensemble du territoire ». Je suis certaine que les dispositions que nous avons prises nous permettront de respecter ces deux objectifs au bénéfice des femmes victimes des violences et de leurs enfants. Je vous remercie de nous y avoir aidés, madame la ministre. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

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