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Questions au gouvernement

Politique budgétaire

Monsieur le Premier ministre, avec la suppression de l’ISF, la baisse de l’impôt sur les sociétés, la suppression de la taxe sur les dividendes et un prélèvement forfaitaire sur les revenus de l’épargne, c’est bien un budget pour les riches (Approbation sur plusieurs bancs des groupes GDR et FI.). Ce n’est pas par jalousie que nous demandons d’en rendre publics les bénéficiaires, mais parce que ces cadeaux fiscaux sont non seulement indécents, mais aussi économiquement inefficaces. (Mêmes mouvements.) Ce n’est pas parce que nous serions envieux que nous proposons un vrai plan de lutte contre l’évasion fiscale, mais parce que cette dernière représente chaque année l’équivalent de notre déficit. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.)
À l’opposé, en baissant les aides personnalisées au logement, les APL – et en augmentant la CSG pour les retraités à partir de 1 200 euros mensuels, vous mettez en œuvre des mesures non seulement injustes, mais aussi contre-productives, puisqu’elles rabotent la consommation des ménages.
Lorsque vous réduisez les cotisations sociales pour donner – dites-vous – du pouvoir d’achat, non seulement vous privez la Sécurité sociale de financements, mais vous récupérez par ailleurs, notamment par les coups portés aux hôpitaux de proximité.
Autres tours de passe-passe : les prélèvements opérés sur les agences de l’eau, qui entraîneront inéluctablement des hausses de tarifs pour les usagers, l’amputation des ressources des petites chambres de commerce et d’industrie (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR), au détriment des services rendus aux petites entreprises de nos territoires (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et FI), et la réduction des aides aux collectivités, et plus particulièrement aux communes, qui conduira à supprimer des services de proximité ou à alourdir la fiscalité locale.
Monsieur le Premier ministre, ne craignez-vous pas, en allégeant autant les premiers de cordée tout en alourdissant la charge des plus modestes dans une France où la pauvreté ne cesse de croître, que la corde casse ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, FI et NG ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur Chassaigne, j’ai bien trop de respect pour vous – un respect sincère et non feint – pour me permettre de dire que votre question serait posée en termes excessifs, voire caricaturaux. Je ne le dis donc pas. (Rires et applaudissements sur divers bancs.)
M. André Chassaigne. Qu’en termes élégants ces choses-là sont dites ! (Sourires.)
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Vous avez évoqué dans votre question un certain nombre de mesures qui figurent dans ce projet de budget, mais vous n’en avez pas évoqué, en revanche, toute une série d’autres, que vous connaissez pourtant parfaitement car vous êtes attentif à l’ensemble de la politique fiscale et budgétaire.
M. Éric Straumann. L’augmentation du déficit ?
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Ainsi, vous n’avez pas évoqué la revalorisation de l’allocation adulte handicapé, de la prime d’activité ou du minimum vieillesse, ni la mesure, que j’ai rappelée, de dédoublement des classes de CP,…
M. Fabien Di Filippo. Et la ruralité ?
M. Edouard Philippe, Premier ministre. …dont je ne suis pas sûr que vous puissiez penser un instant qu’elle serve les intérêts de ceux que vous appelez les plus riches.
Plusieurs députés du groupe LR. Et l’augmentation du gazole ?
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Vous n’avez pas évoqué, ou pas entièrement, le fait que l’augmentation de la CSG est la contrepartie d’une baisse des cotisations salariales et que cette mesure a en effet pour objet d’augmenter le pouvoir d’achat de tous les actifs, y compris des plus modestes. Vous le savez pourtant, car vous connaissez les chiffres et êtes un observateur objectif de ces éléments.
M. Christian Hutin. Et les retraites ?
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Vous n’avez pas dit que 40 % des retraités les plus fragiles seraient exonérés de l’augmentation de la CSG. En faisant en sorte que les 40 % les plus fragiles des retraités ne soient pas concernés par cette augmentation, nous protégeons ceux qui, d’une certaine façon, sont ceux auxquels vous vous adressez le plus souvent et que, comme nous, vous voulez protéger.
M. Pierre Cordier. On verra !
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Autrement dit, vous dénoncez une politique qui serait destinée aux plus riches, en oubliant celle qui est destinée aux plus fragiles.
Plusieurs députés du groupe LR. Ce n’est pas très clair !
M. Edouard Philippe, Premier ministre. De l’endroit où je suis, je crois que notre objectif est de nous adresser à tous les Français et de faire une politique pour tous les Français.
Mme Danièle Obono. Pour les riches !
M. Edouard Philippe, Premier ministre. Lorsque, comme l’a dit Mme la ministre des armées, nous augmentons les crédits de la défense (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.), parce que le monde est dangereux, nous ne servons ni les plus riches ni les plus fragiles : nous servons les Français.
Lorsque nous revenons sur une politique de l’éducation qui n’était, de mon point de vue, pas satisfaisante, comme celle qui a été mise en œuvre dans les cinq années précédentes, nous ne le faisons ni pour les plus riches ni pour les plus faibles, mais pour les Français et pour leur niveau d’éducation. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR, FI et LR.)
Cette politique s’intègre dans tous les domaines. Je ne suis pas sûr de vous convaincre en vous disant cela, monsieur Chassaigne – avant même de vous répondre, du reste, je n’avais pas cette prétention (Sourires) –, mais je sais que le débat peut être objectif et équilibré. Reconnaissez avec moi que les choses sont moins déséquilibrées que vous ne l’avez dit dans votre question est qu’elles sont probablement au moins aussi équilibrées que je l’ai dit dans ma réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

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