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Questions au gouvernement

Prise en charge du handicap

Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement est régulièrement interrogé sur les mesures en faveur des personnes en situation de handicap. Les réponses apportées valorisent les mesures adoptées et celles annoncées lors du comité interministériel sur le handicap. Nous apprécions toute avancée, notamment quand elle concerne une citoyenneté accrue.
Mais, dans le même temps, certains choix politiques vont à l’encontre du volontarisme affiché.
Vous dites augmenter l’allocation aux adultes handicapés, mais vous neutralisez cette augmentation en supprimant l’indexation sur l’inflation (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes SOC, FI et LR) ; vous la rabotez même par des mesures pénalisantes et rejetez la proposition de loi de Marie-George Buffet visant à exclure les ressources du conjoint dans les bases de calcul. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)
Dans le même temps, vous créez un quota de logements accessibles aux personnes en situation de handicap en abaissant le seuil à seulement 20 % des logements neufs dans les immeubles collectifs, au lieu de 100 % actuellement. (M. Aurélien Pradié applaudit.)
Dans le même temps, un décret du 18 mai 2018 supprime la prise en charge, par l’assurance maladie, des transports des patients qui, hospitalisés en continu ou en longue durée, reviennent pour un court séjour en famille. Pensez-vous que des parents aux revenus modestes pourront prendre en charge le transport sanitaire de leur enfant handicapé placé en centre médical spécialisé ?
C’est donc un moment de vie normal, de bonheur rare, qui se trouve rayé du quotidien, et ce pour alléger les charges de la sécurité sociale.
Monsieur le Premier ministre, est-il acceptable que l’obsession de réduction des dépenses publiques conduise à remettre en cause, notamment pour des personnes handicapées, des droits aussi fondamentaux qu’un revenu correct, un logement adapté et des moments passés en famille, en un mot, qu’elle conduise à remettre en cause le droit au bonheur ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI. – MM. Aurélien Pradié et Jean Lassalle applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Edouard Philippe, Premier ministre. La question du handicap, monsieur Chassaigne, figure au premier rang de nos priorités. Il y a deux semaines, j’ai réuni, au côté de Mme la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, un comité interministériel sur cette question. Nous avons souhaité tirer les conséquences d’un certain nombre de travaux, sur lesquels nous aurions avantage à nous appuyer pour améliorer les droits et la situation des personnes handicapées. Parmi ces travaux, je mentionnerai en particulier ceux du député Adrien Taquet.
À l’occasion de ce comité interministériel, nous avons annoncé des décisions relatives à la citoyenneté : vous vous en êtes félicité, et je vous en remercie. Permettez-moi d’aller un peu plus loin en souhaitant que les droits de voter, de se pacser ou de se marier ne soient pas, comment dirai-je, mis de côté à cause de procédures judiciaires qui, pour être explicables, ne sont plus de mise ici, car elles privent les personnes en situation de handicap ou sous tutelle d’une partie de leurs droits. Sur ce point, nous proposerons des avancées notables.
Lorsque la situation de handicap est durable, ou n’est pas destinée à évoluer, il convient aussi de faire cesser les très mauvaises habitudes qui conduisent les intéressés – ou leur famille, leur entourage, ceux qui les accompagnent – à devoir réitérer l’ensemble des procédures permettant de justifier de cette situation. Cela ajoute au handicap une forme de parcours du combattant administratif qui n’a plus sa place dans notre société, et que nous voulons donc faire cesser.
Je me permets de souligner ce point, monsieur le président Chassaigne, car vous savez combien ces changements, que l’on serait porté à regarder d’un peu haut si l’on ne connaît pas la situation, sont en réalité essentiels. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Vous avez aussi évoqué les questions budgétaires et financières. Ce qui m’anime, je le dis en préambule, est moins le souci de la dépense publique que celui d’équilibrer enfin, et dans la mesure du possible, les comptes. Si le fait de ne pas s’en soucier suffisait à faire le bonheur des intéressés, alors tout serait réglé depuis quarante-quatre ans. Mais, la vérité, c’est que notre pays est en déficit budgétaire depuis quarante-quatre ans, sans que les problèmes qui vous préoccupent, à commencer par la prise en charge du handicap, ne soient réglés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Penser à l’équilibre des comptes, penser à l’avenir budgétaire de notre pays, ce n’est pas s’en tenir à une étroite orthodoxie budgétaire, ni faire litière du droit au bonheur que vous avez évoqué : c’est faire preuve, dans la gestion des deniers publics, d’un sérieux que j’assume assez bien car il répond, je crois, à une demande de nos concitoyens. (Mme Catherine Fabre applaudit.)
Notre pays va consentir des efforts budgétaires considérables pour les personnes en situation de handicap. Vous avez évoqué l’allocation aux adultes handicapés ; reconnaissez avec moi que son augmentation en deux temps – puisqu’elle sera portée à 860, puis à 900 euros – implique une hausse de la dépense publique de 2,5 milliards d’euros sur l’ensemble du quinquennat.
Cette hausse est donc tout sauf accessoire : elle est même importante, et elle est indispensable. C’est pourquoi nous l’avons décidée, et c’est pourquoi l’Assemblée l’a votée.
De même, la fusion de la CMU-C et de l’aide à la complémentaire santé améliorera considérablement l’accès aux soins des personnes handicapées. La création du forfait d’intervention précoce, monsieur le président Chassaigne, permettra aussi de mieux prendre en compte les jeunes enfants diagnostiqués – ou pré-diagnostiqués – comme autistes. Grâce à cette évolution majeure, sur les plans financier et pratique, de jeunes enfants seront accompagnés dans de bien meilleures conditions qu’aujourd’hui.
L’aide à la garde d’enfants n’est pas oubliée non plus, avec une majoration de 30 % du complément de libre choix du mode de garde et un soutien renforcé aux crèches qui ouvrent des places dédiées aux enfants handicapés. Et puisque vous m’avez interrogé sur les questions financières, le budget alloué au soutien aux entreprises adaptées et à l’emploi accompagné augmentera quant à lui de 40 % en 2019.
Ce ne sont pas là de petites mesures.
Il y en aura d’autres, dans le cadre du projet de loi de finances en discussion. J’espère que, sur ce sujet comme sur beaucoup d’autres, nous pourrons nous rejoindre. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

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