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Questions au gouvernement

Réforme des retraites

Dimanche, trois personnes ont perdu la vie dans de violentes intempéries, qui appellent à repenser notre emprise et notre empreinte. Des centaines de femmes et d’hommes étaient mobilisés. De tels événements nous rappellent combien leur engagement nous est vital, combien il est courageux, combien il est un des actes quotidiens de la République. (Applaudissements.)

Dimanche soir, trois hommes engagés pour sauver des vies en notre nom à toutes et tous ont perdu la leur : le pilote Jean Garat, le mécanicien opérateur de bord Michel Escalin et le sergent-chef Norbert Savornin, pompier aux centres de secours de Martigues et de Marignane. Je voudrais ici, avec vous, dire avec force et humilité notre soutien et notre reconnaissance à ces personnes et rendre hommage aux trois disparus, l’hommage de la République rassemblée. (Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.)

J’en viens à ma question, monsieur le Premier ministre. Elle porte, vous l’imaginez, sur l’avenir de notre droit à la retraite, que nous aurions les moyens de conforter, mais qui a été déjà très abîmé. Ce jeudi, partout en France, à l’appel de plusieurs organisations syndicales, auront lieu des arrêts de travail massifs et de grandes manifestations. Depuis des mois, vous donnez le sentiment de faire joujou avec nos retraites. Depuis des mois, vous semez l’inquiétude pour tout argument. Depuis des mois, vous tentez de préparer l’opinion à une régression sociale majeure. Depuis des mois, vous essayez d’imposer un grand chamboule-tout des retraites, en jouant sur tous les paramètres : travailler plus longtemps, réduire les pensions, individualiser les droits.

Le monde du travail ne veut pas d’un droit rabougri. Il ne veut pas de ce système dangereux. La France en a marre de la casse sociale !

Monsieur le Premier ministre, vous semblez hésitant – avec raison, d’ailleurs. Allez-vous enfin entendre raison, cesser les opérations de dénigrement, ranger votre mauvais brouillon et ouvrir de véritables discussions ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Député de la nation, élu des Bouches-du-Rhône, vous rendez hommage, monsieur Dharréville, à trois hommes dont le métier, la mission et peut-être même la vocation étaient de secourir, d’aider leurs concitoyens, de faire en sorte que, dans les drames, dans les catastrophes, il y ait une main ferme pour aider ceux qui en ont besoin. Cet engagement, cette vocation, ils savaient parfaitement qu’ils pouvaient les conduire à prendre des risques. À l’évidence, en acceptant de sortir en hélicoptère dans l’occasion que vous avez rappelée, ils ont pris un risque.

Leur mort est un drame, et elle nous plonge tous dans une tristesse que vous avez su très bien décrire, monsieur le député. Je voudrais, au nom du Gouvernement, m’associer au chagrin qui est le vôtre et manifester tout notre respect à ces hommes, à leurs familles ainsi qu’à tous ceux qui ont la même vocation, le même courage de servir pour aider. (Applaudissements.)

Votre question porte sur la réforme des retraites et je ne vous surprendrai pas en disant que nous ne sommes pas d’accord. En effet, le projet du Gouvernement a été exprimé de façon très claire, et cela dès le début. (M. Maxime Minot s’exclame.)

Il s’agit de construire un système universel, donc unique, qui fonctionnera par répartition et par points, et qui a pour objet de faire en sorte que chaque euro cotisé par chaque Français, quel que soit son statut ou la nature de l’activité qu’il exerce, offre les mêmes droits. C’est d’une très grande simplicité, et aussi d’une très grande solidarité, car la protection de chacun sera assurée par tous les cotisants, sans règles particulières, sans déficits de régimes particuliers qui auraient à être comblés par l’impôt ou les contributions des autres – bref, il s’agit d’une solidarité nationale.

Je ne crois pas, monsieur le député, que vous puissiez être contre une solidarité nationale, à laquelle chacun contribuerait à hauteur de son travail. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Cette réforme, nous avons pris le temps de la discuter. Il est arrivé, par le passé, que l’on reproche à ce gouvernement une approche verticale des réformes. Eh bien, cette fois, nous avons pris le temps de discuter avec l’ensemble des organisations syndicales et patronales, de les consulter, d’examiner avec elles leurs demandes et leurs revendications.

Certaines – vous le savez parfaitement – sont très favorables à l’installation d’un système universel de retraite ; d’autres, c’est vrai, y sont très opposées. Nous avons travaillé avec toutes ces organisations syndicales et patronales. Le haut-commissaire a formulé des propositions au mois de juillet 2019.

Sur la base de ces propositions, nous avons échangé avec les organisations syndicales et patronales pour concevoir et rédiger le projet de loi qui correspondrait aux engagements qui ont été pris par le Président de la République pendant la campagne présidentielle. Je suis certain que vous en conviendrez : le fait de mettre en œuvre un engagement qui a été pris par le Président de la République, ce n’est pas rien ; cela me semble correspondre parfaitement à la logique démocratique à laquelle, j’en suis sûr, vous êtes attaché.

Nous aurons l’occasion – le haut-commissaire, d’abord, au début de la semaine prochaine, moi ensuite – de dire quelles sont les propositions du Gouvernement pour mettre en place ce système universel.

Nous avons d’ores et déjà indiqué que la totalité des droits acquis dans la carrière seraient préservés, même si, c’est vrai, l’instauration d’un régime universel de retraite implique la disparition des régimes spéciaux. Néanmoins, vous ne m’avez jamais entendu, monsieur le député, critiquer ou dénigrer ceux qui relevaient d’un autre régime que le régime général – jamais. Je vous mets au défi de trouver dans mes propos une quelconque critique envers ceux qui bénéficient d’un régime qui a été organisé – vous auriez bien du mal à le faire, et je crois que vous le savez. Ces personnes ne se trouvent pas dans une situation irrégulière, ces régimes ont été pensés. C’est d’ailleurs pourquoi nous sommes extrêmement attentifs aux conditions de la transition à engager des quarante-deux régimes actuels vers le régime à venir : nous ne voulons pas imposer les choses avec brutalité à des personnes qui ont parfois fait des choix de vie en fonction des conditions prévues par les régimes anciens.

Autrement dit, le travail de concertation a porté ses fruits. Très prochainement, nous aurons l’occasion de proposer un système cible qui sera plus respectueux des droits des femmes (M. Adrien Quatennens fait un signe de dénégation), plus respectueux des droits de ceux qui subissent une carrière hachée, mais qui sera tout aussi solidaire, et à mon sens bien plus solidaire que les quarante-deux régimes actuels – je pense notamment aux pans de la réforme concernant les pensions de réversion.

Nous discuterons dans le courant de l’année 2020 de ce projet de loi dans l’hémicycle. C’est une discussion riche et passionnante qui s’annonce, et j’ai hâte qu’elle commence. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

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