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Questions au gouvernement

Sécurisation de l’emploi

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Mme Jacqueline Fraysse. Tout à l’heure débutera la discussion du projet de loi dit de sécurisation de l’emploi. Nous aurons l’occasion au cours de la semaine de dire notre opposition à cet accord que vous qualifiez d’historique.
Historique, il l’est certes à plus d’un titre tant les régressions qu’il contient sont nombreuses pour les droits des salariés. D’après vous, le texte serait équilibré : la flexibilité exigée par les agences de notation et le patronat serait introduite en échange de droits nouveaux pour les salariés. Nous pensons le contraire. Si la flexibilité, ou pire le recul des droits, sont bien présents – je pense notamment à la réduction de cinq à deux ans des délais de recours, au mépris du principe général du droit – la contrepartie pour les salariés est loin de sauter aux yeux. De même, si l’entrée d’un ou deux salariés dans les conseils d’administration est sans aucun doute positive, on mesure déjà à quel point leur pouvoir sera limité pour peser sur la direction.
Le Président de la République a déclaré jeudi dernier que « toute correction devra être approuvée par les signataires » et vous-même, monsieur le ministre du travail, avez enfoncé le clou ce matin dans la presse avec cette phrase : « Aujourd’hui, c’est l’accord, tout l’accord, rien que l’accord. »
Il y a là une double entorse à la démocratie parlementaire. (Approbations sur quelques bancs du groupe UMP)…
M. Marc Dolez. Très bien !
Mme Jacqueline Fraysse. D’abord, à la séparation des pouvoirs, car ce n’est pas au Président de dicter sa conduite au Parlement (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP) ; ensuite, au respect de l’article 34 de notre Constitution dans la mesure où ce ne sont pas les partenaires sociaux qui font la loi mais les élus de la nation. (Mêmes mouvements.)
Je pose donc la question suivante à tous ceux qui sont ici présents, y compris à vous, monsieur le ministre : dans ces conditions, à quoi servons-nous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Plusieurs députés du groupe UMP. Et du chômage !
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Au cours des jours et des nuits qui viennent, madame Fraysse, nous aurons l’occasion de démontrer à quoi sert la démocratie sociale et à quoi sert la démocratie politique.
M. Lucien Degauchy. Charabia !
M. Michel Sapin, ministre. Ce que je crois très important de souligner à propos de cet accord du 11 janvier – sur lequel chacun est totalement libre de porter un jugement, qu’il soit négatif ou positif – c’est l’articulation que nous sommes en train d’inventer entre démocratie sociale et démocratie politique.
Démocratie sociale, d’une part. À quoi cela renvoie-t-il ? Au pouvoir des salariés dans l’entreprise, aux lois Auroux poussées jusqu’au bout, à la possibilité de négocier dans une entreprise au lieu de supporter le poids d’une décision prise unilatéralement, au fait d’être partie prenante dans la négociation pour peser et pour obtenir quelque chose. (Applaudissements sur les quelques bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Démocratie politique, d’autre part. Madame la députée, je suis le premier avec vous à défendre la suprématie de la loi. La loi est la règle supérieure. C’est elle qui fixe le droit. À aucun moment, ni dans les accords entre partenaires sociaux, ni dans mes discours, ni dans mes diverses interventions, vous ne pouvez avoir relevé de mises en cause de cette suprématie de la loi.
Mais une loi qui s’inspire d’un accord entre partenaires sociaux, c’est une loi plus forte encore, parce que c’est une loi durable, parce que c’est une loi qui ne sera pas remise en cause au gré des alternances, parce que c’est une loi qui s’appliquera rapidement. Quand on a participé à l’élaboration d’une loi issue d’un accord entre partenaires sociaux, on est immédiatement partie prenante de l’application de la loi. La loi s’appliquera d’autant plus vite que ce seront les partenaires sociaux qui l’auront élaborée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Jacqueline
Fraysse

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