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Budget de l’État

Débat prélèvement sur recettes au profit de l’UE

Le débat annuel portant sur le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne est l’un des rares moments où il est possible d’évoquer la politique européenne dans cet hémicycle. Pourtant, il y a tant à dire !
Des carcans dogmatiques empêchent l’Union européenne d’adopter la politique progressiste que nous appelons de nos vœux.

Le premier est le dogmatisme budgétaire. Le covid a été l’élément qui a fait exploser les règles budgétaires, ce qui prouve que les dirigeants européens savent utiliser l’instrument monétaire lorsque survient une crise majeure. Mais la Première ministre s’est empressée d’expliquer que le retour à l’austérité budgétaire allait rapidement être à l’ordre du jour. Pire, dans le cadre des négociations diplomatiques ayant conduit à l’adoption tant vantée d’un plan de 750 milliards d’euros, la France a accepté – comme c’est souvent le cas pour d’autres pays – que le versement des aides soit subordonné à la conduite de réformes libérales visant notamment l’assurance chômage et les retraites.

On comprend mieux l’empressement de l’exécutif à faire ces réformes aussi dangereuses qu’impopulaires, et aucunement justifiées.

Les règles budgétaires européennes seraient tenables si le dogmatisme comptable qui les inspire ne se doublait pas d’un dogmatisme fiscal, l’Union européenne refusant toujours d’instaurer une taxe sur les transactions financières. Une telle taxe permettrait pourtant à la finance européenne de contribuer au redressement économique du continent. Rappelons, en outre, que l’Union européenne compte toujours des paradis fiscaux parmi ses membres.

Il est indispensable de mobiliser des sommes importantes pour enclencher la transition écologique en Europe. Le Plan vert de la Commission européenne a fixé un objectif de baisse des émissions de dioxyde de carbone de l’Union européenne d’au moins 55 % d’ici à 2030. Avec les carcans budgétaires actuels, cependant, le financement de cet objectif est loin d’être assuré ! N’oublions pas que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime les investissements nécessaires pour la transition écologique à 6 % du PIB, soit 900 milliards d’euros par an à l’échelle européenne. Comment pourrons-nous relever ce défi sans changer les règles de fonctionnement de l’Union ?

Comment, par ailleurs, assurer la transition écologique alors que l’Union européenne continue de signer des accords de libre-échange ? Les accords conclus récemment avec la Nouvelle-Zélande et le Mexique constituent un danger à la fois pour notre planète et pour les finances européennes puisque chacun d’eux supprime les droits de douane et nous fait perdre autant de ressources propres. Ces pertes sont compensées par l’augmentation des prélèvements sur recette des États membres – augmentation sur laquelle nous sommes appelés à nous prononcer aujourd’hui pour notre pays.

Les contribuables européens paient, d’un côté, pour compenser la perte des droits de douane sur la viande néo-zélandaise et, de l’autre, pour soutenir la PAC destinée à aider les éleveurs européens qui ne s’en sortent plus. Cette situation est scandaleuse. La schizophrénie doit s’arrêter ! ( Mme Karine Lebon applaudit.)
Les accords de libre-échange signés par l’Union européenne sont dangereux pour les peuples. Dernièrement, la France a été attaquée par une entreprise allemande au nom du Traité sur la charte de l’énergie (TCE) pour des décisions prises dans le cadre de la transition écologique. Cherchez l’erreur ! Ce traité constitue un frein à la transition écologique et sociale, laquelle est nécessaire pour affronter le monde de demain. L’adoption récente par l’Union européenne d’un accord sur les salaires minimums pourrait favoriser cette transition et sortir plusieurs millions de travailleurs de la grande pauvreté, mais le texte risque de rester lettre morte, aucune définition commune du salaire minimum européen n’ayant été proposée. Pour le définir, le Parti communiste français propose de choisir le mieux-disant social en Europe, c’est-à-dire le salaire minimum espagnol, porté à 60 % du salaire moyen – soit 1 900 euros bruts mensuels en France.

S’agissant, enfin, de la guerre en Ukraine, l’alignement de Bruxelles sur les positions de Washington et de l’Otan est déplorable. Plutôt que de se présenter comme une force d’équilibre et de conserver sa légitimité diplomatique dans les négociations, l’Union européenne s’est embarquée dans la vente d’armes et dans la formation de soldats ukrainiens, ce qui ne fait que rajouter de la guerre à la guerre. Il est impératif, au contraire, de se donner les moyens de la paix.

La seule préoccupation de l’Europe doit être de préserver la paix sur son continent. Avec la diplomatie qui est la sienne, elle n’est même pas capable de défendre cet intérêt fondamental.

Pour toutes ces raisons, nous sommes convaincus que l’Union européenne doit changer en profondeur. Parce que ce changement indispensable semble encore très improbable, les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine estiment qu’il n’est pas possible de voter en faveur du crédit de 24,5 milliards d’euros au profit de l’Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES – M. Matthias Tavel applaudit également.)

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Jean-Paul
Lecoq

Député de Seine-Maritime (8ème circonscription)

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