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2 questions sur les annulations de crédits en 2017

Enfin, monsieur le secrétaire d’État ! Nous avons enfin l’opportunité de débattre dans cet hémicycle des 4 milliards d’euros d’annulations de crédits décidés unilatéralement, par décret, au cours de l’été 2017, au mépris des règles budgétaires, comme l’a rappelé la Cour des comptes dans son dernier rapport.
Qui ne se souvient de cette mise en scène estivale, en trois temps ? Premier temps : un nouvel exécutif et une nouvelle majorité. Deuxième temps : un rapport de la Cour des comptes, forcément alarmiste, sur la situation budgétaire de la France, qui appelle des mesures choc. Troisième temps : des milliards d’euros d’économies décidées unilatéralement.
Dans la même période, vous avez brutalement diminué de 5 euros le montant des aides personnalisées au logement – APL – pour l’ensemble des allocataires. Cette décision a occasionné, de la part de plusieurs membres du Gouvernement, de vives réactions dont je vous donne un florilège. « S’ils continuent comme ça, je me casse ! » a dit Jacques Mézard. Julien Denormandie a parlé de « mauvaise décision », tandis que le Premier ministre disait que « les mesures de rabot ne sont jamais intelligentes ». Enfin, le Président de la République l’a qualifiée de « connerie sans nom ». J’arrête là cette énumération de citations, dont je partage l’esprit.
Le grand écrivain brésilien Paulo Coelho disait qu’une erreur constamment répétée, ce n’est plus une erreur, c’est un choix. Monsieur le secrétaire d’État, la baisse des APL décidée en 2017 a fait la quasi-unanimité contre elle, et a été condamnée jusqu’au plus haut sommet de l’exécutif. En tirerez-vous les conclusions en rétablissant ces 5 euros en 2018 ? Ou bien confirmerez-vous l’erreur de 2017 en 2018, ce qui la transformerait en choix politique ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Monsieur le député, vous connaissez vous-même la réponse à la question que vous posez. Nous sommes en 2018, et la loi de finances pour 2018 a été votée, en fixant ces allocations au niveau que vous connaissez, au terme d’un débat auquel vous avez participé.
Votre question sur le niveau des APL me permet d’abord de souligner que le montant de dépenses exécutées en 2017 a été supérieur au montant observé pour l’année 2016, malgré la mesure que vous avez évoquée.
Vous avez commencé votre question en faisant référence au décret d’avance portant sur l’annulation de 4 milliards d’euros de crédits. Ce décret a été pris après que le Premier ministre eut commandé à la Cour des comptes un rapport d’audit ayant pointé les risques d’un dérapage des dépenses, qui aurait eu pour conséquence de porter le déficit public à 3,2 ou 3,3 % du PIB. Pour éviter cela, des engagements ont été pris en dépense, et les objectifs ont été atteints : à la fin de l’année, cet effort d’économie a représenté 2,6 milliards d’euros.
Il faut aussi avoir en tête qu’au total, sur l’année 2017, 4,2 milliards ont été annulés en dépense, mais 7 milliards ont été ouverts pour financer de nouvelles priorités : le solde des annulations et des ouvertures est donc positif. Je précise en outre qu’en termes d’exécution, les moyens dont ont disposé les ministères au cours de l’année 2017 ont été en augmentation par rapport à l’exécution 2016, à hauteur de 9 milliards.
Je ne crois donc pas que l’on puisse réduire notre politique économique à une politique d’austérité en se fondant sur un seul décret d’avance. En revanche, je tiens à dire – j’aurai certainement l’occasion de le répéter ce soir – qu’un effort de « sincérisation » budgétaire a été accompli à l’occasion de l’élaboration de la loi de finances initiale pour 2018 et que la réserve de précaution est passée de 8 % à 3 %, avec l’objectif que les crédits programmés soient le plus proche possible de la réalité.
Nous sommes à la mi-juin et, comme vous avez pu le constater, aucun décret d’avance n’a été pris et aucun n’est prévu : cela nous permet de dire à l’ensemble de ceux qui gèrent des crédits d’État ou qui bénéficient de crédits d’État que l’exécution budgétaire telle que nous la prévoyons pour la fin de l’année 2018 se fera sans décrets d’avance, et sans le mouvement qu’on a pu connaître au mois de juillet dernier. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Peu, pour sa seconde question.
M. Stéphane Peu. Monsieur le secrétaire d’État, ne jouez pas sur les mots ! Ce que je voulais savoir, c’est si, lors du débat que nous aurons à l’automne 2018 sur la loi de finances initiale pour 2019, vous confirmeriez la baisse de 5 euros des APL. C’est ainsi qu’il fallait comprendre ma question, et vous le savez bien.
J’en viens à ma deuxième question. La Cour des comptes évoque, au sujet des annulations, un « effort budgétaire inégalement réparti ». Certaines missions ont été singulièrement touchées : la politique de la ville, à hauteur de 300 millions d’euros, l’enseignement supérieur et la recherche, pour 331 millions, et l’administration pénitentiaire, pour 77 millions.
C’est sur l’évolution du budget alloué au secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes que nous aimerions vous interroger. Bien que l’égalité entre les femmes et les hommes ait été érigée au rang de grande cause nationale du quinquennat, ce secrétariat d’État s’est vu confisquer plus de 7 millions sur un budget initial de moins de 30 millions – montant déjà fort peu élevé au vu des prétendues ambitions du Gouvernement. C’est près de 27 % de son budget qui a été amputé !
Nous doutons que cette baisse puisse se faire sans toucher les services des droits des femmes et les associations qui les défendent. Permettez-moi de citer les propos de Marilyn Baldeck, directrice générale de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail : « C’est une baisse de 2,5 % du budget de l’armée qui a entraîné la démission de son chef d’état-major. À 27 % de baisse sur un budget déjà ridicule, devrions-nous nous taire ? »
Je demande des précisions, sans langue de bois, sur les conséquences de ces annulations de crédits.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Monsieur le député, vous avez évoqué les annulations de crédits, à hauteur de 7,5 millions d’euros, pour le secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes. Il faut préciser qu’un peu plus de la moitié de ces 7,5 millions ont été eux aussi pris sur des crédits en réserve, donc non affectés : ceux-là sont donc certes désagréables, mais indolores en termes de montants de subventions.
Tous les ministères ont été mis à contribution dans le cadre de l’effort de 4 milliards d’euros que j’ai évoqué en répondant à votre question précédente. Il est bien évident que la suppression de 3,5 millions sur ce secrétariat d’État a pu avoir des conséquences sur le niveau d’accompagnement et de subvention. En revanche, il faut souligner – je souhaite que ce soit le cas dans les prochains mois – que le secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes travaille aussi de manière interministérielle, en ce sens que chaque ministère, dans son périmètre, développe en lien avec lui des actions en matière d’égalité salariale et d’égalité de droits entre les femmes et les hommes.
Pour ne prendre qu’un exemple, celui de la fonction publique – dossier que je connais le mieux – nous avons publié il y a quelques semaines une circulaire commune visant à la prévention de l’ensemble des actes, des propos et des comportements sexistes et des actes de violence sexiste ou sexuelle dans l’ensemble des administrations. Cela se traduit par la mise en place de référents et de procédures, par le renforcement des sanctions disciplinaires contre celles et ceux qui se rendent coupables de ces actes qui ne sont pas acceptables dans la fonction publique ni d’une manière générale au travail. Ce type d’initiative n’a pas de traduction budgétaire et ne nécessite pas de mobiliser les moyens financiers spécifiquement affectés au secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les hommes et les femmes. Cela ne l’empêche pas d’être menée, et nous continuerons d’agir de la sorte.
Pour conclure, ce qui compte, c’est la manière dont nous voyons l’avenir. Or vous avez pu constater, dans la loi de finances initiale pour 2018, que les moyens de ce secrétariat d’État ont été sanctuarisés – ils ont même connu une légère hausse – pour répondre aux besoins et aux enjeux de l’égalité entre les femmes et les hommes

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