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Discussions générales

Agence nationale du sport et organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024

L’aboutissement de la commission mixte paritaire sur ce texte de loi entérine le bouleversement du modèle sportif français. C’est avec amertume que je constate que le Parlement a été mis, une nouvelle fois, complètement de côté pour la création de l’Agence nationale du sport. En l’introduisant au dernier moment dans un projet de loi portant sur un autre sujet, le Gouvernement a empêché toute réflexion de fond sur la nature du service public du sport que nous voulons pour notre pays.

Depuis deux ans, la réforme de la gouvernance du sport est menée dans un flou total, déstabilisant l’ensemble du mouvement sportif. Nous avons tout d’abord appris le projet de création d’une agence par la presse, puis, en décembre dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, la majorité a décidé de supprimer le Centre national pour le développement du sport – CNDS – en fléchant ses taxes affectées vers la future structure, alors que nous ne connaissions ni ses missions, ni sa composition.

Cet amateurisme s’est de nouveau manifesté avec la création de l’Agence sous forme de groupement d’intérêt public. Le Conseil d’État a clairement démontré que la structure de l’Agence ne correspondait pas au GIP tel qu’il est défini par la loi, l’État étant pour l’instant le seul financeur parmi les codécisionnaires. Enfin, pour donner une base légale à l’Agence, le Gouvernement a décidé de manière cavalière de l’introduire dans un projet de loi qui n’a rien à voir. Le Parlement n’est pas une simple chambre d’enregistrement devant subir les tâtonnements du Gouvernement.

Sur le fond, les députés communistes ne soutiennent pas non plus sa création. Les collectivités territoriales et le mouvement sportif doivent évidemment être étroitement associés aux politiques sportives de notre pays. Cependant, ce n’est pas en affaiblissant le rôle de l’État que nous augmenterons les capacités des autres acteurs à agir. Au contraire, l’État doit retrouver sa place centrale, renouer avec des politiques sportives ambitieuses et trouver les outils législatifs pour casser les barrières à la pratique, par exemple.

En creux, c’est l’avenir du ministère des sports qui se joue. L’Agence le remplace dans l’exercice de ses missions principales que sont le développement du sport pour tous et le soutien au haut niveau. Son administration est très affaiblie et ses services déconcentrés, notamment, ne possèdent plus l’autonomie nécessaire pour assurer leurs missions. Quant à ses moyens, ils sont faméliques, après deux ans de baisse drastique de son budget.

La transformation progressive du ministère des sports en simple direction des sports est une erreur stratégique grave. Le sport est un service public à part entière, qui a besoin d’un ministère fixant les grands axes et se posant en garant de l’intérêt général. Sans ministère des sports, les petites fédérations seraient encore plus en difficulté, et la France n’aurait pas pu mener la bataille qu’elle a conduite pour l’éthique et contre le dopage. Sans ses fonctionnaires, nos résultats dans les grands événements sportifs seraient médiocres.

La volonté du Gouvernement de transférer les conseillers techniques sportifs aux fédérations n’est que la simple traduction de ce désengagement. En se privant des fonctionnaires déployant les politiques publiques du sport partout dans le pays, l’exécutif entérine définitivement la disparition de celles-ci. Imagine-t-on une seule seconde les politiques publiques culturelles ainsi abandonnées ? Pourquoi réserver un tel traitement au sport, quand on connaît ses bienfaits et ses valeurs, portées par les millions de bénévoles et de salariés dont l’ambition quotidienne est de donner accès à la pratique sportive au plus grand nombre ?

Les députés communistes soutiendront la ratification des ordonnances, afin de préparer au mieux les Jeux olympiques et paralympiques de 2024. S’agissant des voies réservées, nous nous félicitons que la rédaction du Sénat ait été conservée, car elle précise que la mise en service de ces voies doit être strictement proportionnée aux objectifs de sécurité et de fluidité. En effet, l’impact sur les populations locales doit être le plus faible possible, les voies réservées se situant le plus souvent dans des zones au trafic déjà extrêmement dense.

Enfin, nous invitons le Gouvernement à ratifier dès la rentrée les deux ordonnances de décembre 2018 et de mars 2019 relatives à la lutte contre le dopage et la mise en conformité avec le code mondial antidopage. C’est une condition sine qua non pour accueillir les Jeux olympiques et paralympiques, et je regrette que l’amendement de Marie-George Buffet permettant cette ratification n’ait pu être examiné lors de la première lecture. Il y va de la crédibilité de la France, qui a toujours été pionnière dans la lutte antidopage. (M. Ugo Bernalicis applaudit.)

Si nous soutenons la ratification des ordonnances relatives à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques, nous ne pourrons voter en faveur de ce texte consolidant l’Agence nationale du sport. Les députés communistes appellent le Gouvernement à entamer avec le Parlement un travail de fond sur l’avenir du service public du sport, débouchant, enfin, sur une loi ambitieuse qui le consolide. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI.)

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Alain
Bruneel

Député du Nord (16ème circonscription)

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