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CMP - Géolocalisation

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, comme l’a souligné la CNIL dans son avis du 19 décembre 2013, rendu public le 11 février dernier, les dispositifs de géolocalisation « ne sont pas uniquement des aides techniques à la réalisation de filatures sur la voie publique, telles que réalisées par les enquêteurs, mais peuvent également apporter des éléments relatifs à la vie privée qui n’auraient pas pu être portés à la connaissance des enquêteurs dans le cadre d’une filature traditionnelle [… ]. Il est donc nécessaire qu’un encadrement strict soit respecté dans le cadre des enquêtes prévues par le code de procédure pénal. »
Il est en effet urgent de définir un cadre juridique clair et précis pour le recours à cette technique, conformément aux exigences posées par les jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de cassation. C’est pourquoi nous soutenons ce projet de loi qui vient combler l’actuel vide juridique et établit un juste équilibre entre, d’une part, le respect de la préservation des libertés individuelles et, d’autre part, l’efficacité des enquêtes et la sécurité des procédures.
S’agissant du champ des infractions concernées, nous sommes satisfaits que la CMP ait décidé de retenir le quantum de cinq ans adopté au Sénat en première lecture. Cela nous paraît plus respectueux de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui énonce clairement que les infractions visées doivent être d’une certaine gravité et que l’ingérence de la puissance publique dans la vie privée doit être proportionnée aux nécessités de la sûreté publique. Nous sommes également favorables à la distinction retenue entre les atteintes aux personnes, qui doivent appeler plus de sévérité, et les atteintes aux biens. Nous soutenons donc le fait que soit également concernées les atteintes aux personnes punies d’au moins trois ans de prison.
S’agissant, ensuite, des conditions d’intervention des magistrats du parquet et du siège dans les opérations de géolocalisation en temps réel, comme je l’avais souligné en première lecture, la solution retenue du délai maximal de quinze jours consécutifs durant lequel l’autorisation du juge des libertés et de la détention n’est pas requise est, certes, conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, mais, à nos yeux, l’intervention du magistrat du siège le plus tôt possible dans la procédure constitue une garantie plus forte. A fortiori, l’intervention du juge des libertés et de la détention au bout de huit jours, telle que le Sénat l’avait prévue, nous paraissait plus satisfaisante. C’est également l’avis de la CNIL, comme l’ont rappelé, il y a quelques instants, nos collègues Sergio Coronado et Thierry Braillard.
Le texte prévoit également que la décision du procureur de la République, du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction est écrite. Il s’agit, pour nous, d’une garantie essentielle, même si une procédure d’urgence est prévue, qui permet à l’officier de police judiciaire de se passer, dans un premier temps, d’accord écrit, l’autorisation du magistrat compétent pouvant être donnée par tout moyen. Toutefois, le magistrat ayant autorisé l’opération dispose d’un délai de vingt-quatre heures pour prescrire par écrit sa poursuite. Si nous étions plus favorables au délai de douze heures voté par le Sénat, ce délai de vingt-quatre heures constitue un compromis entre le délai de quarante-huit heures initialement proposé par le Gouvernement et celui voté au Sénat.
S’agissant enfin de l’intrusion dans un lieu privé, nous approuvons la distinction établie entre les véhicules et parkings, dans lesquels cette intrusion est un délit puni de trois ans de prison, et les autres lieux privés, professionnels et d’habitation, lesquels nécessiteront que l’enquête ou l’instruction porte sur une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement.
Pour conclure, les députés du Front de gauche estiment nécessaire et urgent de combler le vide juridique relatif à l’utilisation de la géolocalisation. C’est la raison pour laquelle ils voteront ce texte, qui définit un cadre juridique strict pour les pratiques de géolocalisation. Celles-ci sont soumises à des conditions précises et réservées aux enquêtes sur les délits d’une particulière gravité. L’instauration de ce cadre est, à l’évidence, une mesure protectrice des droits et libertés.

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