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Débat sur les avantages fiscaux donnés aux Français depuis 2017 - Question

Monsieur le ministre, l’ISF est une question fiscale, mais c’est d’abord une question sociale. Son rétablissement est à ce titre souhaité par une majorité de Français, y compris par certains des vôtres, attachés à la question sociale et qui vous quittent à l’heure actuelle. Vous avez lâché au total 3,5 milliards, sachant que le patrimoine de ceux qui étaient redevables pouvait dépasser le milliard. Fallait-il cette manne, style « argent de poche », pour obliger ces Français à ne pas quitter notre pays et à y investir ? Le groupe GDR proposera de revenir sur ce débat dans le cadre de sa niche parlementaire. Pour l’heure, vous tentez d’apaiser la colère en promettant une évaluation de la suppression de l’ISF. Mais je vous rappelle que déjà, sur le CICE, les évaluations, notamment celle de l’Institut des politiques publiques, avaient conclu à des effets certes positifs sur les marges des entreprises, c’est-à-dire à terme sur leurs profits, mais à des effets modestes, quasi nuls, sur l’emploi et sur l’investissement. Malgré cela, vous avez pérennisé ce cadeau par la baisse des cotisations patronales. Dès lors, comment allez-vous procéder à cette évaluation, alors que la suppression de l’ISF n’a été assortie d’aucune condition et qu’on voit mal à quel saint vous pourriez vous vouer aux fins de discerner quelle part d’investissement aurait été versée au quitus de ladite suppression ? À vous entendre, nous n’attendons de toute façon pas une évaluation qui remettrait en cause cette décision. Mais – c’est ma seconde question – aurons-nous au moins une évaluation à porter au débat de l’Assemblée nationale en septembre prochain, à défaut de l’avoir été au débat auquel les Français ont été invités à participer ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et FI.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur le député, nous disposons de plusieurs indicateurs qui doivent permettre de vérifier que l’allégement de la fiscalité sur le capital a donné les résultats souhaités. S’agissant du financement de l’économie, savoir s’il repose plus sur les fonds propres ou s’il reste autant qu’avant en dettes est un premier indicateur possible. S’agissant de l’attractivité, la France en a-t-elle ou non gagné depuis cette nouvelle fiscalité du capital ? Voilà un deuxième indicateur. Quant à l’efficacité de ces nouvelles mesures sur la redistribution, c’est un troisième indicateur possible. Je ne veux pas me substituer au comité indépendant qui doit rendre ses conclusions en octobre ou en novembre, mais je pense que ces indicateurs peuvent être intéressants. Et je redis que cette évaluation sera bien entendu transparente, publique et accessible à chacun, en priorité aux parlementaires.
Seconde remarque : je crois pour ma part profondément à cette évaluation. Sans être dogmatique, je crois profondément à l’allégement de charges et je pense que c’est une excellente décision de transformer le CICE en allégement de charges en 2019 pour garantir la stabilité fiscale dont tout le monde a urgemment besoin, les ménages comme les entreprises. Cela étant, que nous disent les conclusions de l’évaluation de France Stratégie sur le CICE ? Que jusqu’à 1,6 SMIC, éventuellement 2,5 SMIC, cet allégement est extrêmement efficace et permet de créer beaucoup d’emplois, alors qu’au-delà, l’efficacité devient marginale alors que le coût, lui, est élevé. Je ne veux pas préjuger des conclusions que nous en tirerons, mais je pense qu’à partir du moment où c’est l’argent du contribuable, il faut vérifier l’efficacité de la mesure. C’est la même chose pour les niches fiscales : regardons quels sont l’efficacité et le rendement des 100 milliards d’euros de niches fiscales. Mais faisons-le dans une très grande ouverture d’esprit. Ne disons pas : « Telle niche est trop sensible, n’abordons pas le sujet. » Examinons toutes les niches fiscales, car c’est à chaque fois l’argent des Français qui est utilisé. Cela doit donc être efficace.
Vous avez évoqué la question sociale. Je vous y sais très sensible. La première fois que nous nous sommes rencontrés, c’était à un moment douloureux, chez vous, à Saint-Étienne-du-Rouvray. Je vais vous dire ma conviction profonde : la première question sociale, c’est le chômage. Et les choix que le Gouvernement a faits en matière de fiscalité, croyez-le bien, ont été faits parce qu’ils sont pour nous une réponse à cette question sociale essentielle qu’est le chômage.

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Hubert
Wulfranc

Député de Seine-Maritime (3ème circonscription)

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