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Déclaration de politique générale

Monsieur le Premier ministre, l’acte II que vous venez de définir ne va pas répondre à l’urgence climatique ni aux demandes de la majorité de nos concitoyens. Voici dès lors la déclaration de politique générale que les députés communistes, démocrates et républicains vont faire aux Français.

D’abord, répondre à l’urgence pour notre industrie menacée : il faut envoyer un signal fort, solennel, et tout faire pour que la France ne laisse plus tomber une seule de ses usines. General Electric, Whirlpool Amiens, Arjowiggins, Renault, Ford Blanquefort, Ascoval... Ces piliers de notre industrie sont stratégiques pour notre pays. Ils doivent faire l’objet d’une intervention directe de l’État.

Avec nous, l’industrie et les circuits courts deviendront une priorité nationale, un enjeu de souveraineté, tant pour notre économie que pour relever le défi climatique. Car un pays sans industrie est un pays sans avenir. Et quand on produit local, c’est bon pour l’emploi mais aussi pour le climat. Nous définirons ainsi une politique industrielle ambitieuse pour notre pays ; des filières stratégiques seront protégées, à l’opposé du pillage et de la vente de nos bijoux de famille à des fonds de pension. À ce titre, nous ferons gagner du temps et de l’argent aux Français en annulant la privatisation d’Aéroports de Paris – ADP – et de la Française des Jeux. ADP est stratégique pour notre pays, pour notre compagnie nationale, pour notre sécurité et même pour tenir nos engagements climatiques : vous n’êtes vraiment pas à la page en voulant le privatiser !

L’urgence, c’est aussi la santé. C’est pourquoi nous mettrons en place immédiatement un plan en faveur de nos hôpitaux publics et de nos EPHAD – établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – sans oublier les outre-mer, où la situation sanitaire est également alarmante. Il s’agira d’abord de revenir sur toutes les fermetures de lits, de services d’urgences et de maternités organisées depuis votre arrivée au pouvoir. Ensuite, il s’agira de dégager des moyens financiers, avec un plan d’embauches pour répondre aux besoins : il manque au moins 100 000 emplois à pourvoir au plus vite, dont 10 000 dans les services d’urgence !

L’urgence, c’est le pouvoir d’achat, c’est la lutte contre la vie chère, en métropole comme en outre-mer.
Nous proposerons le 1er juillet une hausse de 20 % du SMIC en deux ans, dans le privé comme dans le public. Et nous mettrons en place dès cet été une conférence nationale des salaires pour que l’ensemble des salariés en bénéficient.

La hausse des salaires doit venir des entreprises et non pas de nos impôts, comme vous le faites, car au final ce sont toujours les classes moyennes qui paient. Nous disons, nous, que les grandes entreprises en ont les moyens, elles qui distribuent aussi généreusement les dividendes aux actionnaires – 57 milliards d’euros en 2018 pour celles du CAC40, en hausse de 12 %. Ces entreprises-là, lit-on dans la presse, ont enfin tourné la page de la crise financière : il serait grand temps que leurs salariés puissent en faire autant eux aussi !

Quant aux petites et moyennes entreprises, elles bénéficieront enfin, avec nous, d’un réel accompagnement de l’État, y compris dans leurs investissements, grâce à un pôle public bancaire qui leur prêtera à taux zéro en fonction de leurs engagements pour l’emploi et pour la planète. Rien à voir, donc, avec les aides publiques et les exonérations de cotisations tous azimuts que vous distribuez allègrement, sans contrepartie, aux pollueurs, aux géants du numérique, aux Carrefour, Auchan et consorts qui licencient malgré tout.

Vous annoncez vouloir réformer l’assurance chômage : nous préférons, nous, chasser le chômage plutôt que les chômeurs. C’est pourquoi nous proposerons aux partenaires sociaux de créer le CDI du XXIe siècle, intégrant la formation et qui sera digne d’un vrai contrat de travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) Ce sera autre chose que les CDD, les contrats Uber ou intérimaires qui précarisent encore plus les femmes, les jeunes et les salariés. Nous voulons faire rimer travail avec sécurité et dignité, et non, comme vous le faites, avec précarité et pauvreté.

La justice pour tous, c’est aussi la justice pour les plus fragiles, comme pour nos retraités. Afin que plus personne ne vive en dessous du seuil de pauvreté, nous déciderons d’aligner au niveau du SMIC les allocations de solidarité en faveur des plus démunis, des personnes handicapées et des retraités.

Nous mettrons en chantier une réforme des retraites toujours solidaire et pleinement innovante, à la hauteur des enjeux de notre siècle, et nous fixerons comme objectif une pension accessible dès 60 ans, avec 75 % du dernier salaire plafonné ou au niveau du SMIC pour les basses pensions. Nous préférons, voyez-vous, offrir une nouvelle vie aux retraités et permettre aux jeunes de les remplacer plutôt que de leur promettre, comme vous le faites, de travailler plus.

Au MEDEF comme chez vous, le dogme c’est « travaillez plus ! » alors que nous sommes au XXIe siècle, à l’ère des robots et que l’on compte chez nous 5,5 millions de chômeurs.

L’urgence est aussi démocratique, et nous voulons y répondre sans tourner autour du pot.

Tout le monde est d’accord pour mettre en place un référendum d’initiative citoyenne : cela doit donc se faire vite et de manière accessible pour tous. Mais l’enjeu est aussi de renforcer le pouvoir du Parlement. Nous mettrons donc en place une assemblée constituante pour écrire, avec nos concitoyens, la nouvelle République tant attendue et tourner enfin la page de la monarchie présidentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe FI.)

Nous mettrons alors au centre de la République les citoyens et la commune comme l’échelon principal de la démocratie et premier service public de France.

Nous répondrons enfin à l’exigence de justice fiscale par la révolution fiscale, indispensable pour financer les mesures d’urgences que je viens d’évoquer.

Nous rétablirons tout d’abord l’impôt de solidarité sur la fortune et annulerons une série de mesures et niches fiscales coûteuses telles qu’entre autres le crédit d’impôt compétitivité emploi, le crédit d’impôt recherche, la flat tax, la niche Copé : il y a là, au bas mot, 50 milliards d’euros à récupérer.

Nous mettrons en outre en place un impôt plus juste et plus progressif sur tous les revenus, y compris ceux du capital, pour que les gros paient gros et que les petits paient petit et pour que les richesses que nous produisons soient plus justement réparties au bénéfice de ceux qui les produisent.

Nous déciderons de mener une lutte sans merci contre la fraude et l’évasion fiscale, d’en faire enfin une grande cause nationale et de l’inscrire dans notre Constitution. Pas besoin d’un énième rapport : la triche est là, sous vos yeux ! Le manque à gagner pour notre pays est compris entre 80 et 100 milliards d’euros.

Avec une liste réelle des paradis fiscaux, avec le prélèvement à la source des bénéfices des multinationales, avec plus de moyens humains à Bercy et au service de la justice, et avec la case prison assurée pour tous les corrompus et les délinquants en col blanc, je peux vous assurer que nous allons, dans ce domaine, changer de braquet. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

En mettant tout en œuvre pour récupérer de telles sommes, nous disposerions ainsi de ressources nouvelles pour nos services publics, pour nos écoles, pour une audacieuse politique de la mer digne de notre rang de deuxième puissance maritime, mais aussi pour enclencher enfin la transition écologique.

L’urgence, c’est aussi et surtout le climat. Nous proposons donc de revenir sur la privatisation de la SNCF et de baisser la TVA sur les transports collectifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) Là où vos choix conduisent à fermer de petites lignes et à multiplier les cars et les camions sur la route, nous préférons, nous, doubler le fret ferroviaire et rendre gratuits les transports en commun partout où c’est possible.

Nous proposons d’engager un vaste plan de rénovation thermique des bâtiments, que nous chiffrons, nous, au rythme de 500 000 par an, en y consacrant les financements publics correspondants. Enfin, nous voulons répondre au problème de la vie chère.

J’ai déjà parlé des salaires, du travail, de la solidarité, mais il y a des factures qui ne cessent d’augmenter. La hausse de 5,9 % sur leur facture d’électricité, la plus importante depuis la privatisation d’EDF, est insupportable pour nos concitoyens, et d’autant plus insupportable que, depuis 2003, les actionnaires ont touché 21,3 milliards d’euros.

L’exaspération fiscale des Français vient surtout de là : de ce sentiment d’être pris sans cesse pour des vaches à lait quand une infime minorité s’en met plein les poches. Nous reviendrons, nous, sur cette hausse et nous baisserons immédiatement la TVA sur l’électricité pour la ramener au taux de 5,5 %, comme de nombreux produits de première nécessité.

Monsieur le Premier ministre, oui, le capitalisme est à bout de souffle : ce n’est pas moi qui l’ai dit, c’est le Président.

Vous ne proposez rien d’autre que d’y rester. Le chemin que vous nous proposez a pourtant été mille fois parcouru : il conduit à une impasse, pour nous comme pour la planète.

Nous voulons sortir de ce chemin du dogme de la concurrence libre et non faussée. Nous voulons protéger la planète, partager les richesses et mettre le bonheur de chaque citoyen au cœur de la République.

Voilà notre projet, aux antipodes de ce que vous venez de nous présenter : c’est pourquoi les députés communistes, démocrates et républicains refusent de vous accorder leur confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et plusieurs bancs des groupes FI et SOC.)

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Analyse du scrutin : déclaration de politique générale - 12 juin 2019
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