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Economie : contrats d’assurance vie non réclamés

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mes chers collègues,
Les contrats d’assurance sur la vie représente le premier placement des français. Plus de 22 millions de contrats ont d’ores et déjà été signés pour un montant global de 1100 milliards d’euros ! La loi que nous examinons aujourd’hui en seconde lecture fait écho au problème soulevé par Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, concernant les pratiques contestables de certains organismes assureurs proposant des contrat d’assurance vie. En effet, la question des encours des contrats d’assurance-vie non réclamés et de la recherche de leurs bénéficiaires est confrontée à l’opposition des organismes assureurs pour qui les contrats en déshérence représentent une manne d’argent considérable. Il y aurait en France entre 150 000 et 170 000 contrats d’assurance-vie non réclamés qui représenteraient des sommes oscillant entre 1 milliard selon le gouvernement et 4 milliards selon certaines associations. Cet argent souvent issu d’une épargne de plusieurs décennies est captés sans vergogne par les organismes d’assurance et cela contre le volonté des défunts. Faire fructifier l’argent de personnes décédés ou placées en maison de retraite au nom de la quête du profit est tout simplement inacceptable.
Les députés communistes et républicains ne sont pas favorables au principe de l’assurance-vie. Nous ne pouvons soutenir un dispositif d’épargne permettant d’effectuer une donation exonérée de droits de succession jusqu’à 152 500 euros et quasiment défiscalisé puisque les produits et intérêts capitalisés au contrat ne sont pas imposés durant toute la vie de ce dernier. Je fus d’ailleurs heureux de noter Monsieur le Rapporteur, que vous concédiez vous-même, que l’argent dégagée par cette proposition de loi, ne servirait à la croissance française que s’il n’était pas réinjectés à nouveau dans un autre contrat. Pourquoi alors continuer à favoriser ces placements à grands coups de politiques de défiscalisation ?
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui complète la législation actuelle, qui, il faut l’avouer, souffrait de bon nombre de limites. La loi du 1er août 2003 obligeant les assureurs à envoyer chaque année au souscripteur d’un contrat d’assurance-vie une information relative à son contrat afin de favoriser la transmission d’informations à l’égard des personnes ayant accès aux documents en cas de décès, était insuffisante. La loi du 15 décembre 2005 matrice de la création de l’association pour la gestion des informations relatives aux risques en assurance, l’AGIRA, a permis de centraliser les demandes concernant les bénéficiaires de contrat d’assurance-vie avant de les adresser pour traitement aux organismes d’assurance. De mai à décembre 2006, l’AGIRA a enregistré plus de 6000 demandes. 627 dossiers ont été menés à leur terme, représentant à eux seuls plus de 12 millions d’euros ! Ce dispositif est certes intéressant, il fait cependant reposer l’ensemble de la démarche sur le seul bénéficiaire, dédouanant de toute responsabilité les organismes d’assurance Or, il existera toujours des personnes ou des associations qui ne pourront jamais savoir qu’ils sont les bénéficiaires d’un contrat d’assurance-vie.
La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui, comporte d’indéniables qualités. L’obligation d’une recherche sérieuse de la part des assurances ou mutuelles des ayant-droits de contrat d’assurance-vie, qu’il s’agisse d’assurés âgés dont l’adresse n’est plus la bonne ou des bénéficiaires désigné trop vaguement par la personne décédée, représente une précieuse avancée. La consultation par les organismes-assureurs du répertoire national d’identification des personnes physiques établi par l’INSEE facilitera grandement la démarche. Il reste regrettable que la fréquence de ces consultations ne soit pas fixée par le texte. Je tenais aussi à m’associer à la critique émise en commission par mon collègue socialiste Alain Vidalies. Il est dommage que l’Assemblée Nationale et le Sénat n’ait pas prévu un taux minimum de rémunération du capital garanti faisant référence au taux légal en cas de décès de l’assuré. Contrairement à ce que vous avez répondu M.le Rapporteur, je crains que cet absence de règlement entraîne une revalorisation à minima des contrats. Le contrôle de l’application de la loi ne sera en ce sens que trop tardif.
Enfin, je reprendrai ici les critiques émises au Sénat par Bernard Verna concernant l’affectation des capitaux non-réclamés au Fonds de réserve des retraites. Le PLFSS 2007 prévoit en effet que les montants des contrats d’assurance-vie non réclamés par leurs bénéficiaires au terme d’un délai de 30 ans sont, théoriquement depuis le 1er janvier 2007, affectés au Fonds de réserve des retraites. Il est regrettable que la proposition de loi ne raccourcisse pas ce délai, qui nous semble excessivement long, alors que le Fonds de réserve des retraites aurait bien besoin de ces capitaux non réclamés. Le gouvernement estimait d’ailleurs cette ressource du FRR à 15 millions d’euros en 2007. Malheureusement, à en croire le PLFSS 2008, « pour les années à venir, aucun produit n’est à attendre de cette recette ». Le rejet de l’amendement déposé à ce sujet par mon collègue Bernard Verna est regrettable. Cela aurait permis d’approfondir la dynamique engagée par la proposition de loi.
En conclusion, ce texte, qui répond pour beaucoup aux attentes des associations de consommateurs, bénéficie du soutien des élus communistes et républicains.

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Pierre
Gosnat

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