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Encadrement des stages

En février dernier, lors de l’examen de cette proposition de loi en première lecture, nous avions salué un texte qui va dans le bon sens. Dans un contexte où la recherche de stages tient moins aux compétences des étudiants qu’à leur carnet d’adresses ou à celui de leurs parents, et où le stage proprement dit s’apparente trop souvent à une zone de non-droit où les stagiaires remplacent parfois des salariés sans en avoir ni les droits, ni la rémunération, c’est une bonne chose d’interdire formellement le recours aux stagiaires pour exécuter une tâche régulière ou pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, pour remplacer un salarié absent ou pour occuper un emploi par définition saisonnier.
C’est une bonne chose également que les stagiaires aient les mêmes droits que leurs collègues salariés, qu’il s’agisse des droits à congés, de la prise en charge des frais de restauration et des frais de transport ou encore de la lutte contre les discriminations et le harcèlement.
C’est une bonne chose enfin que l’Inspection du travail puisse contrôler les stages et que soit prévue dans le code du travail la possibilité de requalifier un stage en contrat de travail.
« Les stagiaires ne sont pas des salariés », a-t-on entendu sur les bancs de la droite : et pour cause, aucun salarié n’accepterait de travailler pour une rémunération aussi ridiculement faible ! Faute d’avoir une rémunération décente, il est au moins heureux que les droits des stagiaires soient renforcés. Il est également heureux que les établissements d’enseignement supérieur d’où proviennent les stagiaires soient davantage responsabilisés. Jusqu’à présent, ils se contentaient trop souvent d’exiger la réalisation d’un stage pour sanctionner un cycle d’études, sans se soucier des difficultés à trouver un stage lorsque l’on n’a pas de réseau relationnel, ni des conditions de travail des stagiaires.
Dorénavant, l’accompagnement et la visibilité du stagiaire seront renforcés grâce à une meilleure définition du rôle de l’enseignant référent et du tuteur. Les stages, d’une durée limitée à six mois, devront s’intégrer dans un cursus pédagogique scolaire ou universitaire.
Nous regrettons cependant que la commission mixte paritaire soit revenue sur certaines dispositions adoptées par nos collègues sénateurs, qui renforçaient plus encore les droits des stagiaires.
Une disposition prévoyait que tous les stages de plus d’un mois donnent lieu à rémunération : la CMP a préféré revenir à deux mois.
Une autre disposition plaçait encore plus l’établissement d’enseignement face à ses responsabilités, en l’obligeant à trouver un stage pour les étudiants qui n’y parviendraient pas seuls : la CMP a considéré qu’il suffisait que l’établissement accompagne les étudiants dans leur recherche, avec le risque qu’ils n’y parviennent pas, ce qui reste préoccupant pour les jeunes.
De même, concernant le nombre maximal de stagiaires qu’une entreprise peut accueillir, celui-ci sera fixé par décret, et non en pourcentage de l’effectif total de l’entreprise, comme le prévoyait le Sénat.
Enfin, les sénateurs avaient cru sage de limiter à 35 heures par semaine la présence des stagiaires dans l’entreprise, un garde-fou que la CMP n’a pas conservé, ce qui est également regrettable. Les étudiants stagiaires ne sont effectivement pas des salariés comme les autres : ils doivent, en plus de leur stage, rédiger un rapport pour leur établissement d’enseignement. Ils doivent même, parfois, vu la modicité de leur rémunération, travailler par ailleurs pour payer leur loyer et leur nourriture.
Quant à la rémunération, justement, les sénateurs avaient décidé une augmentation équivalente à quatre-vingt-sept euros par mois dès la promulgation de la loi. Las, une fois de plus, le Gouvernement a cédé aux pressions du MEDEF – pour le patronat, décidément, il n’y a pas de petites économies ! – en acceptant que cette revalorisation soit repoussée à septembre 2015.
Mme Chaynesse Khirouni, rapporteure. C’est faux !
Mme Jacqueline Fraysse. Si c’est faux, je m’en félicite, madame la rapporteure !
De ce fait, l’augmentation de la rémunération des stagiaires, qui passera alors de 436 à 523 euros par mois, ne correspondra qu’au rattrapage de l’inflation prévue par le Gouvernement. Mais peut-être avez-vous de meilleurs chiffres à me communiquer, madame la rapporteure…
La situation professionnelle des jeunes, la façon dont, trop souvent, ils subissent leurs premières années professionnelles comme de l’exploitation, voire de l’humiliation, est un facteur essentiel pour leur devenir. Il était donc nécessaire de renforcer l’encadrement des stages. C’était d’ailleurs une promesse de campagne de François Hollande. Le candidat Hollande prévoyait également, je le rappelle, un revenu d’autonomie pour les jeunes, qu’il semble, pour le moment, avoir abandonné. Il n’en reste pas moins que ce texte va dans le bon sens. C’est pourquoi nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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