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Loi de programmation des finances publiques 2018 à 2022 - Lect. déf.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 présente le mérite de fixer la feuille de route de ce quinquennat et les priorités politiques de la nouvelle majorité.
La feuille de route est claire, mais la clarté n’empêche pas la contradiction, monsieur le ministre. Emboîtant le pas à vos prédécesseurs, la réduction des déficits publics constituera bel et bien la pierre angulaire de votre politique pour les cinq années à venir. À vrai dire, nous l’avions très rapidement constaté, dès l’été, avec la suppression des contrats aidés et la baisse de l’APL, des mesures dont vous vous gargarisez puisqu’elles devraient vous permettre de passer sous la barre des 3 % de déficit dès cette année. Cocorico !
Pourtant, cette indignation initiale, au demeurant toute relative, vis-à-vis des déficits publics aura rapidement laissé place à une certaine forme de complaisance à leur égard : dès lors qu’il s’agira, par le creusement des comptes publics, de rembourser les 5 milliards d’euros du règlement du contentieux de la taxe à 3 %, à toutes ces grandes entreprises qui ont versé des dividendes faramineux entre 2012 et 2017 ; dès lors qu’il s’agira de permettre le cumul du CICE – le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – et de la baisse des cotisations sociales en 2019, pour un coût total estimé à 40 milliards d’euros ; dès lors que sera mis en place le prélèvement forfaitaire unique à 30 % sur les revenus de l’épargne, un dispositif taillé sur mesure pour l’optimisation fiscale des hauts revenus. Ce constat est partagé par les plus grands économistes, tels Gabriel Zucman, qui chiffre le coût de cette flat tax à 10 milliards d’euros, quand vous l’évaluez à 1,9 milliard. Trouvez l’erreur !
Cette indignation sélective illustre bien l’injustice de vos orientations budgétaires, qui auront des conséquences néfastes, inversement proportionnelles au niveau de vie de nos concitoyens. Partageons ensemble le constat que vos cadeaux aux plus aisés se traduiront par des mesures d’économie sur toutes les politiques publiques venant en soutien des plus fragiles ! C’est le cas de la politique du logement et de l’emploi, que j’évoquais en préambule, avec la baisse de l’APL et la suppression des contrats aidés. C’est également le cas en matière de santé et de protection sociale, alors que nos hôpitaux ont déjà la tête sous l’eau et que l’offre de soins n’est pas garantie sur l’ensemble du territoire, loin de là.
Des territoires, parlons-en, mes chers collègues ! Les 10 milliards d’euros d’économies annoncés dans le programme de campagne de l’actuel Président de la République se sont rapidement transformés, en plein milieu de l’été, en 13 milliards. Quand on connaît la situation des collectivités locales, on comprend que cette annonce ait fait l’effet d’une bombe, entraînant la fronde légitime d’une large majorité des élus locaux, inquiets pour leur autonomie et leur capacité à apporter à nos concitoyens les services dont ils ont besoin. Face à cette mobilisation, vous avez quelque peu ajusté le tir, la semaine dernière, lors de la conférence nationale des territoires. Pour autant, le compte n’y est pas, et nous le déplorons.
Mes chers collègues, comme pour l’ensemble des initiatives législatives, qu’elles soient ou non de nature budgétaire, nous avons formulé des propositions pour tenter d’apporter des ajustements à ce qui nous a été présenté, même si nous en contestions la nature et la philosophie. Nous l’avons fait en responsabilité car c’est ainsi que nous concevons le mandat qui nous a été confié par nos concitoyens. Nous avons surtout élaboré un contre-budget pour montrer aux Français qu’un autre chemin existait, autrement plus ambitieux, autrement plus à même de répondre à leurs besoins.
Face aux désaccords sur la trajectoire que vous entendez réserver à notre pays pour les cinq années à venir, nous voterons contre le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022.

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Jean-Paul
Dufrègne

Député de l' Allier (1ère circonscription)

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