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PLF 2012 : Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Desallangre.
M. Jacques Desallangre. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la peur est le commencement de la sagesse : à l’approche des échéances électorales, le Gouvernement est devenu presque sage ou, pour le moins, il tente de le paraître en attribuant quatre points pour la retraite du combattant. Vos prédécesseurs avaient été frappés de la même sagesse à la veille des élections de 2007 en attribuant deux points d’indice alors que le budget baissait de plus de 130 millions d’euros.
Cette année encore, la baisse est bien là avec une amputation de 140 millions d’euros. Vos prédécesseurs n’avaient pas atteint de tels sommets, ou plutôt de tels abysses.
La baisse était de 105 millions en 2009, de 67 millions en 2010, de 110 millions en 2011, auxquels il faut ajouter plus de 11 millions d’annulations de crédits en septembre dernier pour financer les conséquences de la condamnation de la France dans le cadre du marché truqué des frégates de Taiwan. Avec les 140 millions de cette année, ce sont près de 600 millions d’euros que les anciens combattants auront perdus en cinq ans. En euros constants, cela représente une chute de près de 30 %.
Revenons sur la mesure phare de votre budget : la retraite du combattant. Elle n’entraîne qu’une hausse de 9,5 millions par rapport à 2011. Mesurons donc notre enthousiasme !
Par ailleurs, déplorons encore cette mesquinerie qui reporte son application au 1er juillet 2012. Peut-être est-ce pour tirer, dès aujourd’hui, le bénéfice politique d’une mesure que vos successeurs auront la charge de financer sur le budget 2013.
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense nationale et des forces armées. Ce n’est pas sûr !
M. Jacques Desallangre. Le Président de la République avait promis une revalorisation en matière de rente mutualiste, pour atteindre 130 points d’indice. Elle était de 125 points en 2007 ; elle est toujours figée à 125 points.
En 2006, nous avions créé, à l’unanimité, une allocation différentielle de solidarité pour les veuves d’anciens combattants les plus démunies. Grâce à l’action de tous les parlementaires, le fonctionnement de cette allocation a été amélioré et son plafond relevé. Mais la crise paupérise tous les Français et aussi les anciens combattants. Il reste difficilement acceptable que cette allocation différentielle soit plafonnée à un niveau inférieur au seuil de pauvreté. À ce jour, seules 4 500 personnes en sont bénéficiaires pour un modeste montant de 5 millions d’euros. Nous vous demandons à nouveau de porter ce plafond à 950 euros.
La pauvreté ne frappe pas les seuls conjoints survivants. De nombreux anciens combattants subsistent aujourd’hui avec moins de 850 euros par mois. Nous souhaitons donc qu’ils puissent bénéficier, eux aussi, d’une telle allocation différentielle, qui leur permettrait de vivre dignement, alors qu’ils ont dignement servi la France.
Autre dispositif de reconnaissance que nous devons améliorer : l’attribution de la campagne double aux anciens d’Algérie. Comme pour la décristallisation des pensions, le Conseil d’État a tranché et vous a condamné à rétablir l’égalité rompue. Mais, face à cette condamnation, un décret inacceptable a limité l’application de la campagne double sous de fallacieux prétextes. La non-rétroactivité que vous invoquez ne s’applique pas dans le présent cas puisque la mesure est favorable aux bénéficiaires. Par ailleurs pourquoi ceux qui, comme moi, ont été appelés en 1955, 1956 et 1957 ne sont-ils pas considérés comme ceux qui les ont relevés ? N’ont-ils pas livré les mêmes combats, pris les mêmes risques, couru les mêmes dangers ?
Restons encore au conflit en Algérie avec l’attribution de la carte du combattant. Vous vous étiez engagé à élargir les conditions d’octroi dès lors que les combattants totalisaient 120 jours de présence avec l’arrivée sur le sol Algérien avant le 2 juillet 1962. Où en est-on de cette promesse ?
Enfin, l’année prochaine sera célébré le cinquantième anniversaire des accords d’Évian et du cessez-le-feu. Ces accords furent approuvés par référendum par plus de 90 % de Français. Aujourd’hui, des milliers de communes commémorent cette date. Nous vous demandons que, sur l’ensemble du territoire national, l’État marque obligatoirement sa présence en la personne des préfets et sous préfets lors des commémorations locales.
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. Non ! Il y a une loi de la République !
M. Jacques Desallangre. Il y aurait encore tant de choses à dire sur les pupilles, les orphelins de guerre que l’on fait lanterner scandaleusement, les indemnisations aux victimes des essais nucléaires, la rente mutualiste, la refonte du code PMI, la baisse de la ligne budgétaire consacrée aux appareillages et aux soins – baisse supérieure à celle des pensions –, le sort des veuves des grands invalides, la revalorisation du point PMI, la politique de mémoire. Mais les cinq petites minutes attribuées au groupe GDR ne nous permettent pas d’entrer dans le détail.
Pourtant, je ne pourrais quitter cette tribune sans dénoncer le rapt de dernière heure de 14 millions d’euros qu’a perpétré le Gouvernement dans un amendement qu’il présentera tout à l’heure.
C’est davantage que la somme consacrée aux quatre points de retraite. Ces 14 millions d’euros auraient pu être affectés à tant d’actions réclamées par les anciens combattants !
Par ailleurs, constater par avance des sous-consommations dans un budget qui n’est pas encore entamé, voilà une grande nouveauté et même du grand art. Le jugement des anciens combattants sera sévère pour vous. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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Jacques
Desallangre

Député de Aisne (4ème circonscription)

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