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PLF 2016 (question) : Recherche et enseignement supérieur

L’enseignement supérieur en France est sous-financé. Ce budget 2016 n’inversera pas la tendance.
En 2015, l’État a puisé dans les crédits des universités. Onze universités, vingt-cinq écoles d’ingénieurs et une dizaine de grands établissements ont été mis à contribution.
Le Gouvernement a ponctionné 100 millions d’euros dans les réserves d’écoles et d’universités, dont 35 % uniquement dans le Nord-Pas-de-Calais. Le record a été atteint à Arras, avec 24 millions en moins, devant l’université de Lille II, qui s’est vu retirer 8,7 millions.
Au sein de l’université d’Artois, répartie également sur des pôles de Douai, Béthune, Lens et Liévin, cela a été la douche froide. Nous ne sommes pas le territoire le plus riche. Loin de là. Nous avons donc éprouvé un grand sentiment d’injustice. L’université d’Artois est la deuxième faculté de France pour le pourcentage de boursiers, qui s’élève à 46 % !
Pour 2016, le Premier ministre a annoncé un « effort exceptionnel » de 100 millions d’euros supplémentaires en faveur des universités. Cet effort ne représente que l’annulation du prélèvement effectué en 2015. C’est du moins ce que je conclus. La contribution de l’État aux universités est gelée depuis 2010.
Le rétablissement des 100 millions est un minimum, qui ne peut être « exceptionnel ». Selon certains syndicats réformistes, il manque 500 millions dans l’enseignement supérieur et la recherche. Compte tenu de l’affluence exceptionnelle d’étudiants, on constate un manque de places.
Des pratiques illégales de recrutement se développent dans les universités, qui pratiquent le tirage au sort ou donnent de mauvais renseignements sur les conditions d’inscriptions. Cinquante-quatre universités sélectionnent les étudiants, alors qu’elles étaient que vingt-sept à le faire en 2013, ce qui prive 30 % des étudiants de leur choix initial de formation.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous me garantir que l’université d’Artois récupérera bien ses crédits l’an prochain ? Que comptez-vous faire pour appliquer pleinement le code de l’éducation en matière de recrutement des étudiants ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Thierry Mandon, secrétaire d’État. Monsieur le député, je vous confirme qu’en 2016, le fonds de roulement de l’université d’Artois ne connaîtra pas de prélèvement, pas plus que celui des autres universités et grandes écoles françaises. L’amendement qui vous sera présenté dans un instant vise à garantir que le budget sera financé sans que le fonds de roulement soit sollicité.
Sans revenir longuement sur un passé récent, dont je comprends qu’il ait suscité de vifs débats, je rappelle que certaines universités prélevées l’an dernier disposaient d’un fonds de roulement équivalant à 150 jours de fonctionnement. Les sommes stockées étaient inutiles, puisque les prélèvements ont été opérés après qu’on a mis de côté les sommes nécessaires aux investissements projetés par ces universités. L’existence de tels matelas financiers ne relève pas d’une bonne gestion. Les chiffres du ministère évaluent le niveau maximum à 65 jours de fonctionnement – on peut aller jusqu’à 70, mais rien ne justifie un niveau de thésaurisation plus élevé.
Par ailleurs, il faut se parler franchement dans une assemblée comme la nôtre, ce qui est d’ailleurs conforme à votre conception du débat public. Oui, l’État doit soutenir les universités par sa dotation.
C’est ce qu’il fait cette année, avec des crédits en progression de 65 millions, avant même l’abondement annoncé par le Premier ministre, qui a rajouté 100 millions, soit une augmentation totale de 165 millions au budget des universités. Mais ce serait une erreur de croire que celles-ci pourront absorber l’effort de démocratisation indispensable, et élever le niveau de qualité et d’exigence qui doit accompagner cette démocratisation, sans consentir par elles-mêmes des efforts de ressources budgétaires.
L’État finance 90 % du budget des universités, désormais autonomes. Celles-ci doivent aussi déployer des stratégies de recettes : je pense notamment à la formation professionnelle, dont le champ considérable leur permettrait de développer des ressources propres. Pour ce faire, elles disposent des ressources immobilières et du corps professoral nécessaire. Cela leur offrirait la possibilité d’avoir des budgets un peu plus consolidés. Je pense également à des organisations dont elles doivent se doter pour mieux suivre le parcours de leurs anciens étudiants et s’ancrer davantage dans leur tissu local, territorial et entrepreneurial.
Ne pas dire cette vérité aux universités, ne pas les appeler, alors que l’État accomplit un effort, à développer elles-mêmes des stratégies de financement propres plus audacieuses que ce qu’elles font aujourd’hui, ce n’est pas rendre service à l’enseignement supérieur de notre pays.

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Jean-Jacques
Candelier

Député du Nord (16ème circonscription)

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