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PLF 2016 (séance) : Défense

Il est prévu, pour 2016, une augmentation du budget de la défense de 3,7 %, ce qui est nettement supérieur à la hausse du budget de l’État. Cette augmentation est trois fois plus forte que celle du budget de l’enseignement scolaire – 1,1 % – tandis que les budgets de la recherche, de la culture, de l’emploi et de l’administration territoriale stagnent ou sont en baisse.
La hausse du budget consacré à la dissuasion nucléaire représente, à elle seule, les deux tiers de l’augmentation totale. Le Gouvernement écrase le pays par une cure d’austérité, mais il s’apprête à dépenser 3,721 milliards d’euros dans la dissuasion nucléaire, soit 10,2 millions par jour. Cette augmentation de 758 millions d’euros représente une hausse de 25 % par rapport à 2015.
Aucun budget de l’État n’augmente autant que celui-ci. Le Gouvernement s’est engagé dans le renouvellement des armes nucléaires : ce choix, qui couvre 37 % du budget d’équipement des forces, pèse très lourdement sur l’équipement conventionnel de nos soldats. Aujourd’hui, face aux nouvelles menaces, l’arme nucléaire, c’est la ligne Maginot de 1940 : elle ne donne que l’illusion de la protection. Il faudrait investir massivement dans l’équipement conventionnel pour garantir une protection accrue de nos soldats. Il est inadmissible qu’ils soient parfois contraints de s’équiper en protection individuelle à leurs frais.
L’article 6 du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires impose de « poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée ». Où sont les initiatives de la France dans ce domaine ? L’abandon de la composante aérienne, je l’ai dit l’an dernier, je l’ai dit plusieurs fois en commission et je le répète aujourd’hui, serait une première étape sur la voie d’un monde sans arme nucléaire. Un rêve, peut-être !
Les effectifs de la mission « Défense » augmenteront, avec 2 300 fonctionnaires supplémentaires. Ce sont 3 081 postes de militaires qui seront créés pour faire face aux besoins grandissants des opérations extérieures et à leurs conséquences sur la sécurité intérieure. Les personnels civils serviront, une fois de plus, de variable d’ajustement. Si le Gouvernement crée 526 emplois dans les catégories A et B, il en supprime 1 307 dans les catégories C et ouvriers d’État. Sur la période 2014-2019, l’objectif de suppression de postes passe certes de 33 675 à 14 925, mais l’objectif de la suppression de postes de travail reste tout de même inacceptable.
Depuis plusieurs années, nos gouvernements ont provoqué un démantèlement progressif d’une part importante de notre industrie de défense : fermeture de la manufacture de Saint-Étienne et des ateliers du Mans, affaiblissement de l’outil industriel et des compétences, ou encore éloignement des centres de décision pour GIAT-Nexter, SAMP, Safran et bien d’autres. On doit particulièrement s’inquiéter de l’emploi à DCNS, qui privilégie des objectifs financiers de court terme sur les besoins de notre défense.
Nous considérons que la défense nationale, troisième poste de dépenses de l’État après l’éducation nationale et le service de la dette, doit contribuer pleinement à la relance de l’industrie française en faisant le choix de fabriquer sur le territoire national les munitions, les fusils d’assaut et les véhicules qui équipent nos armées. Depuis 1717, nos soldats sont équipés d’un fusil français, mais le Gouvernement a fait le choix d’acheter à l’étranger le futur fusil d’assaut qui remplacera l’emblématique FAMAS, et le risque existe que les futurs blindés légers et véhicules tout-terrain soient fournis par Ford ou Volkswagen.
M. Yves Fromion. Volkswagen, vraiment ?
M. Jean-Jacques Candelier. Notre industrie est pourtant capable de fabriquer ces armes et ces véhicules. Il s’agit également d’une question de souveraineté nationale. Jamais l’approvisionnement de nos armées n’a été aussi dépendant de l’extérieur qu’aujourd’hui. Cela est d’autant plus grave que certains de nos fournisseurs bafouent impunément le droit international – à titre d’exemple, l’État d’Israël.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré en commission que l’époque de l’économie administrée vous semble dépassée. Je suis en désaccord avec vous, je le dis gentiment (Sourires) car j’estime qu’il faut faire passer les intérêts de la nation et ceux des travailleurs avant ceux de la finance.
S’agissant des opérations extérieures, la France est en première ligne, trop souvent sans mandat de l’ONU. Le surcoût des opérations extérieures – OPEX – prévu pour 2015 a été très largement dépassé, et ce sont, encore et toujours, les autres budgets de l’État qui paient la facture. Le budget prévu en 2016 pour les OPEX n’est pas sincère. Il contient des dépenses illégales au regard du droit international, comme l’intervention en Syrie ou encore la tentaculaire opération Barkhane, jamais débattue ni votée au Parlement, contrairement à ce que prévoit notre Constitution – je sais ce que vous allez me répondre sur ce point.
M. Yves Fromion. Et Poutine en Ukraine, c’est légal ?
M. Jean-Jacques Candelier. En conclusion, nous affirmons notre soutien aux militaires et aux agents du ministère qui subissent les choix de notre gouvernement en matière de défense. Ces choix sont directement liés à notre adhésion à l’OTAN, que nous remettons en cause. C’est une organisation belliqueuse, coupable de crimes de guerre : citons l’exemple récent, dont il a été question tout à l’heure lors des questions au Gouvernement, du bombardement de l’hôpital de Médecins sans frontières en Afghanistan. Un scandale !
La France doit retrouver sa souveraineté et une parole crédible et respectée à travers le monde. Nous voterons contre ce budget.

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Jean-Jacques
Candelier

Député du Nord (16ème circonscription)

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