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Protection sportifs de haut niveau - 2ème lect.

Dans un contexte tragique, nous examinons en seconde lecture la proposition de loi du groupe socialiste, républicain et citoyen visant à protéger les sportives et sportifs de haut niveau et à sécuriser leur situation juridique et sociale.
Les attentats de vendredi dernier, qui ont visé un concert mais aussi une manifestation sportive, montrent qu’on veut tuer tout ce qui procure du plaisir. Malgré ces événements tragiques, les fédérations française et anglaise de football ont décidé de maintenir la rencontre entre leurs équipes. Ayant entendu tout à l’heure avec beaucoup d’émotion, comme vous sans doute, la Marseillaise chantée par nos amis anglais – que nous rêvons si souvent de battre dans les compétitions sportives ! – et cette magnifique minute de silence, je me suis dit que la décision de maintenir ce match était juste et porteuse de beaucoup de solidarité.
Avant d’en venir au texte lui-même, je salue l’esprit de la présente proposition de loi, qui présente, madame la rapporteure, de nombreux mérites. J’espère, comme nous l’avons dit en commission, que l’on parlera de la « loi Bourguignon ».
La première qualité du texte est la reconnaissance du rôle de nos sportifs et sportives. Ces derniers assurent le rayonnement de la France lors des grandes compétitions internationales. Ils et elles donnent envie à des garçons et à des filles de s’inscrire dans un club, de pratiquer un sport pour leur plaisir et leur bien-être. Ce sont les sportifs et les sportives qui nous procurent la joie d’assister à de nouveaux records, à des beaux gestes sportifs ou à de grandes victoires pour une équipe. La proposition de loi est également un signe fort envoyé aux sportifs et sportives du monde entier, au moment où la France se tourne vers les Jeux olympiques.
La deuxième qualité du texte est la reconnaissance du rôle de l’État, non seulement pour assurer à toutes les pratiques sportives les moyens de leur développement et garantir l’accès au sport pour tous et toutes, mais aussi pour garantir l’éthique et les résultats du haut niveau amateur et professionnel.
Sa troisième qualité est le renforcement du dialogue social, qui répond à des attentes très fortes des acteurs et actrices du mouvement sportif.
Tous ces éléments ne peuvent être accueillis que de manière positive dans un contexte où le sport est confronté à de nombreux défis, liés aux risques que la marchandisation du sport fait peser sur son intégrité et aux pratiques de dopage qui éclaboussent des disciplines sportives.
La réponse à ces défis passe par plus de démocratie à tous les niveaux du mouvement sportif. Elle passe aussi par le comportement des États, en lien avec le mouvement sportif international, pour l’attribution des grands événements sportifs dans le respect d’une éthique. Ce travail en commun de l’État et du mouvement sportif est porteur d’efficacité, l’Agence mondiale anti-dopage vient encore de le montrer, dans la lutte contre le dopage et la corruption.
S’agissant du contenu de la proposition de loi, je veux souligner des avancées qui répondent aux préoccupations du mouvement sportif.
Je pense tout d’abord à l’instauration d’une couverture des maladies professionnelles pour les sportifs et sportives de haut niveau, par le biais d’une prise en charge par l’État et les fédérations. Je pense aussi à la grande avancée concernant les sportives, qui vont bénéficier de droits liés à la maternité.
La création d’un contrat à durée déterminée spécifique et adapté aux particularités de l’activité sportive constitue une autre avancée. Ce contrat tient compte des droits des athlètes tout en s’accordant à la réalité du calendrier sportif. Sur ce point, je salue la contribution des sénateurs qui ont permis d’introduire dans la loi la notion de saison sportive.
L’action des syndicats sportifs professionnels est par ailleurs confortée, puisque de nombreuses mesures sont renvoyées à une négociation préalable avec les partenaires sociaux.
Je souligne aussi les dispositions essentielles qui concernent la formation et l’insertion professionnelle des sportives et des sportifs. La mise en place d’un suivi socioprofessionnel est une avancée qui permet de responsabiliser les fédérations. Ces dispositions vont aider les sportifs et sportives à préparer l’après-carrière sportive, préparation essentielle à leur bien-être et à leur équilibre.
Enfin, je tiens à insister sur la reconnaissance du rôle du Comité paralympique. Cette mesure confirme que le handisport est un sport à part entière, avec des représentants sur le plan national et international. J’espère que cette disposition donnera à la pratique du handisport une meilleure visibilité dans les médias et dans l’imaginaire collectif.
Toutefois, certaines modifications apportées par le Sénat en première lecture me conduisent à soulever quelques questions, quelques doutes. Notre première interrogation concerne le nouvel article 2 bis, qui oblige une fédération nationale non délégataire, habilitée par sa fédération internationale, à inscrire, sur proposition de la fédération délégataire, les compétitions de la discipline au calendrier international et les sportifs de haut niveau aux compétitions internationales. En fait, cet article vise à régler une difficulté franco-française liée à la répartition des pratiques dans les fédérations délégataires. Elle risque de susciter un trouble au niveau des fédérations internationales. Il aurait été préférable de prendre le temps de travailler à une mise en adéquation des disciplines entre fédérations nationales et internationales.
Notre seconde interrogation, à laquelle vous avez répondu au cours de votre intervention, madame la rapporteure, concerne le nouvel article 15 B, qui porte sur l’ouverture des données à caractère personnel aux organisateurs de manifestations sportives, dans le cadre des contrôles sur les paris sportifs. Je crois qu’il convient d’être très vigilant quant à l’application de cette mesure. Il eût été préférable, à mon avis, de laisser aux fédérations délégataires le soin de traiter ces questions.
Après avoir fait part des nombreux mérites de cette proposition de loi, et de ces quelques interrogations, permettez-moi pour conclure de regretter quelques lacunes – vous les avez évoquées, monsieur le secrétaire d’État. Comme je l’ai dit en première lecture, ce texte aurait pu s’enrichir des recommandations de la mission d’information sur l’application du fair-play financier dans les clubs professionnels français, concernant notamment les centres de formations et les agents. Vous en avez parlé.
Je pense également que nous aurions pu aller plus loin s’agissant du suivi socio-professionnel des entraîneurs professionnels. Ces derniers sont confrontés à des carrières de plus en plus courtes et des parcours de plus en plus marqués par l’alternance entre périodes salariées et périodes de chômage. Je regrette, à tout le moins, que nous n’ayons pas inscrit dans la loi une obligation de concertation en matière de formation continue obligatoire des entraîneurs professionnels. La formation continue constitue en effet un outil essentiel pour la maîtrise de leur parcours professionnel.
Monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, chers collègues, les députés du Front de gauche voteront avec beaucoup de plaisir en faveur de cette proposition de loi, qui est au service des sportives et des sportifs de haut niveau. Dans de telles circonstances, je crois qu’il est important de rappeler le symbole que représente le sport. Le message que nous avons besoin de faire passer, c’est que dans toute notre diversité, il y a toujours des valeurs qui nous unissent. Le sport en fait partie. L’organisation des Jeux olympiques en témoigne, en réunissant en un même endroit l’ensemble des nations. C’est pourquoi nous les voulons à Paris en 2024. C’est l’humanité qui peut s’exprimer par le sport. (Applaudissements sur tous les bancs.)

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Marie-George
Buffet

Députée de Seine-Saint-Denis (4ème circonscription)

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