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Question sur l’évolution de la situation au Moyen-Orient et la reconnaissance de l’État palestinien

Monsieur le ministre, dans le quotidien infernal des Palestiniens, l’injustice la plus flagrante le dispute à l’absurde kafkaïen.
À Gaza, le blocus, avec sa liste infinie de produits interdits d’importation, a des conséquences sur la nutrition et la santé des habitants, et notamment des enfants. À Jérusalem-Est, annexé, c’est la politique foncière qui insécurise les Palestiniens. Outil d’exclusion, elle est une machine destinée à imposer l’objectif de Benjamin Netanyahou et de ses alliés d’extrême droite : faire de Jérusalem la capitale de l’État israélien.
En Cisjordanie, il faut prendre une carte pour comprendre dans quel abîme se débat la population. Cette carte, vous la connaissez. Publiée par un mensuel français, elle dessine un territoire qui, de la région de Ramallah, au nord, à celle de Bethléem, au sud, s’est transformé en prison à ciel ouvert. Dans les territoires, mités par les colonies israéliennes, la liberté fondamentale de circuler n’existe pas : il faut cinq heures à un Palestinien pour parcourir 50 kilomètres.
Caractérisée par une juxtaposition de zones sous contrôle israélien, mixte ou palestinien, caractérisée par la ségrégation routière, par son mur de séparation avec ses portes agricoles à ouverture aléatoire, cette carte fragmentée montre que toute continuité géographique est interdite aux Palestiniens. C’est une carte à fragmentation : elle produit aujourd’hui la haine qui laisse augurer des explosions de violence pour demain.
Si, hier encore, le pouvoir israélien invoquait sa sécurité pour justifier l’ensemble de ces mesures géographiques, juridiques et administratives d’empêchement de vivre, aujourd’hui, le gouvernement Netanyahou et l’extrême droite sont passés à un autre stade. Il s’agit de rendre impossible physiquement une solution de paix à deux États et, pire, de faire des Palestiniens des citoyens de seconde zone au seul motif qu’ils ne sont pas juifs – c’est le rêve de la ministre de la justice israélienne.
Monsieur le ministre, la France et l’Union européenne peuvent-elles continuer à se taire devant l’installation progressive d’un régime d’apartheid dans les territoires palestiniens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Monsieur le député, j’ai dit tout à l’heure que l’État palestinien devait être viable : j’entendais par là un État dans lequel on peut vivre.
M. Sébastien Jumel. Ce n’est pas le cas aujourd’hui !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. J’ai déjà eu l’occasion de rappeler à plusieurs reprises la position de la France à l’égard de la colonisation, et le Président de la République l’a exposée directement au Premier ministre Benjamin Netanyahou lors de sa visite à Paris.
La France est particulièrement attentive aux conditions de vie des Palestiniens. Aujourd’hui, nous sommes préoccupés par la situation humanitaire désastreuse qui prévaut dans la bande de Gaza. Ce territoire s’est installé dans une crise humanitaire permanente depuis plus d’une décennie, du fait du blocus israélien qui a commencé en 2007 et des trois conflits successifs avec Israël, en 2009, 2012 et 2014.
La situation s’est encore aggravée au cours des derniers mois du fait de la détérioration de la situation énergétique, et la population voit désormais son accès à l’électricité réduit à deux heures par jour. Le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté dépasse 40 %, et 60 % des jeunes Gazaouis sont au chômage. Je veux redire que la France est et restera pleinement engagée pour venir en aide à la population gazaouie, soit directement, soit par le biais de l’Union européenne. Elle apporte déjà une aide significative dans de nombreux domaines, qu’il s’agisse de l’aide alimentaire, de la formation professionnelle ou de la santé.
La situation est également très difficile en Cisjordanie, où les conséquences de l’occupation pèsent sur le quotidien des Palestiniens et sur les perspectives de développement économique. Je pense notamment aux restrictions en matière de déplacement, que vous avez évoquées, et à l’accès aux ressources. Je pense, enfin, à la situation des communautés palestiniennes installées en zone C, qui vivent dans des conditions précaires, et même de sursis permanent, du fait de la colonisation israélienne, dont j’ai déjà évoqué les conséquences.
Dans ce contexte, la France et l’Union européenne appellent les autorités israéliennes à respecter leurs engagements, au titre du droit international et du droit international humanitaire. Elles demandent notamment la levée des restrictions d’accès et de mouvement, afin que l’aide humanitaire puisse parvenir dans la bande de Gaza, et que les marchandises et les personnes puissent circuler librement, notamment entre la Cisjordanie et Gaza. C’est la position de la France, c’est aussi la position de l’Union européenne.

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Sébastien
Jumel

Député de Seine-Maritime (6ème circonscription)

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