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Ratification ordonnance services de paiement

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, nous abordons l’examen du projet de loi ratifiant l’ordonnance portant transposition de la directive européenne concernant les services de paiement dans le marché intérieur.
En premier lieu, j’aimerais aborder les conditions de transposition de cette directive, car celles-ci soulèvent quelques interrogations, qui ont été légitimement relayées lors des travaux en commission. En effet, l’Assemblée est appelée aujourd’hui à ratifier une directive européenne adoptée en novembre 2015, soit deux ans et demi plus tard. Ce délai est trop important, eu égard aux évolutions d’un marché en pleine mutation, aux nouveaux comportements à réguler et aux impératifs de protection des données des utilisateurs. Il donne en outre l’impression que le législateur a toujours un temps de retard pour définir un cadre concret et ambitieux pour un secteur économique en plein développement, et cela au détriment des usagers, des consommateurs, de celles et ceux qui ont besoin d’un cadre protecteur. C’est regrettable, notamment eu égard aux débats importants qui ont eu lieu au plan européen. La transposition d’une directive européenne deux ans et demi après son adoption fait problème, et cela quel que soit le sujet, quelle que soit la thématique.
Par ailleurs, les conditions de cette transposition ne simplifient pas le travail des parlementaires sur un sujet certes complexe mais, on l’a rappelé, décisif pour la vie quotidienne. Notre groupe est traditionnellement opposé aux habilitations données au Gouvernement à légiférer par ordonnances, car cette procédure prive de facto la représentation nationale d’un débat conséquent sur le sujet, ce que nous regrettons.
J’en viens au fond de ce projet de loi pour le moins technique, quoique décisif, je le disais, en particulier pour nos concitoyens. Il transpose donc la directive européenne qui procède à une refonte importante du cadre réglementaire s’appliquant aux services de paiement dans le marché intérieur européen. Comme le rappellent bien les travaux de notre rapporteure, cette DSP 2, seconde directive sur les services de paiement, vient remplacer la DSP 1 qui, adoptée en 2007, avait harmonisé les règles applicables aux services de paiement dans les États membres, fixé des exigences d’informations et défini des droits et des obligations des utilisateurs et prestataires de services de paiement. Un agrément unique avait été instauré pour tous les prestataires de services de paiement étrangers à l’activité de réception des dépôts ou d’émission de monnaie électronique. Enfin, cette première directive, de 2007, avait consacré la fin du monopole bancaire avec la création de la catégorie juridique des établissements de paiement, personnes morales fournissant habituellement des services de paiement tels que le versement et le retrait d’espèces et les opérations de gestion d’un compte de paiement.
La nouvelle directive de 2015, dont nous parlons aujourd’hui, vient transformer ce cadre législatif avec l’intégration au code monétaire et financier de deux nouveaux services de paiement, des modifications apportées au régime d’agrément, de nouveaux droits et obligations pour les utilisateurs et le renforcement des pouvoirs de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR, en matière de supervision des activités transfrontalières.
Je veux, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, appeler votre attention sur ce dernier point. Il nous semble important de doter l’autorité prudentielle de nouvelles prérogatives pour « surveiller » l’activité économique de ces entités et anticiper au mieux d’éventuels troubles en matière de stabilité financière : c’est là une nécessité. Mais de quels moyens additionnels, humains et financiers, l’ACPR disposera-t-elle pour accomplir ces nouvelles missions ? Permettez-nous, à cet égard, de vous faire part de notre inquiétude quant à la baisse des effectifs plafonds de l’ACPR, votée en fin d’année dernière lors des discussions budgétaires. Cette baisse a en effet de quoi inquiéter alors que l’on confie de nouvelles missions à l’ACPR et que l’on renforce, plus généralement, les exigences prudentielles vis-à-vis des banques.
Autre point de vigilance : la protection des données. Lors des travaux menés au niveau européen, cette problématique a fait l’objet d’âpres débats. Nul doute que des progrès restent à faire pour garantir au maximum la protection et la confidentialité des données des utilisateurs. Le chantier reste donc d’actualité.
Je conclurai en élargissant mon propos, à travers deux points spécifiques sur lesquels nous aurons, parlementaires de toutes sensibilités, à nous pencher au cours des prochains mois. Tout d’abord il y a lieu, incontestablement, de renforcer l’encadrement des frais bancaires. La transparence pourrait aussi être considérablement améliorée afin que les utilisateurs soient parfaitement informés des coûts réels des services bancaires. À l’heure actuelle, l’écart reste en effet immense entre les frais payés par certains de nos concitoyens, notamment les plus fragiles, et le coût réel de certaines opérations bancaires : la Banque centrale européenne l’a indiqué à plusieurs reprises dans ses travaux. Nous devons donc clairement avancer en cette matière, sur laquelle les députés communistes auront l’occasion de faire des propositions au cours des prochains mois.
Notre priorité est aussi de garantir un accès universel à un compte bancaire avec carte de paiement, et de mener une politique volontariste pour lutter contre le surendettement. Pour être intégré, disposer d’un compte de dépôt est un prérequis absolu. L’ensemble de la population, quelle que soit la situation financière de la personne concernée, doit pouvoir en disposer : c’est là une nécessité, un droit fondamental qui, selon nous, doit être consacré par la loi.
Par ailleurs, en matière de surendettement, la situation reste largement préoccupante bien que le nombre de personnes concernées soit en diminution, selon la dernière enquête de la Banque de France, publiée cette semaine. Cette enquête montre que le surendettement touche de plus en plus les populations les plus fragiles, notamment les adultes isolés et les personnes dont les revenus sont inférieurs au SMIC ou aux minima sociaux. Mes chers collègues, cette bascule dans la spirale du surendettement a des conséquences dramatiques pour toutes ces personnes ainsi que pour leurs familles. Cette situation nous appelle à la réaction. Aussi notre groupe fera-t-il des propositions, là encore, pour briser la mécanique qui conduit trop de nos concitoyens dans le surendettement. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG.)

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Hubert
Wulfranc

Député de Seine-Maritime (3ème circonscription)

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