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Discussions générales

Rénovation des modalités d’inscription sur les listes électorales

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. Marc Dolez.
M. Marc Dolez. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la question des modalités d’inscription sur les listes électorales a souvent été sous-estimée en raison de son apparence technique. Aujourd’hui cependant, au regard de l’accroissement constant de l’abstention, elle constitue un enjeu démocratique non négligeable. Plusieurs études ont en effet pointé les contraintes pesant sur le calendrier d’inscription sur les listes électorales ainsi que sa complexité.
Notre système est en effet l’un des plus lourds et des plus compliqués au monde. Dans leur ouvrage La démocratie de l’abstention, publié en 2007, Cécile Braconnier et Jean-Yves Dormagen relèvent que les électeurs qui sont correctement inscrits sont rarement des abstentionnistes constants mais que le vote intermittent se développe depuis les années 1980, tendance qui s’est d’ailleurs confirmée et amplifiée ces dernières années. La non-inscription sur les listes électorales, ou la « mal-inscription », c’est-à-dire l’inscription un bureau de vote ne correspondant plus au domicile, constitue ainsi un facteur essentiel d’exclusion durable du jeu électoral.
Comme les rapporteurs l’ont parfaitement indiqué, sur les 45 millions d’inscrits sur les listes électorales, on dénombre 6,5 millions de mal-inscrits auxquels il faut ajouter au moins 3 millions de Français qui ne sont pas inscrits du tout.
Face à ce constat, auquel évidemment personne ne peut se résigner, la mission d’information créée en 2014 s’est très utilement interrogée sur les conditions qui permettraient de concilier l’impératif démocratique de participation citoyenne aux élections et la nécessaire sécurisation de la procédure d’inscription. Dans leur rapport, nos collègues Elisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann avaient formulé vingt-et-une propositions particulièrement pertinentes en vue d’assouplir le calendrier de l’inscription et de simplifier sa procédure.
Les trois propositions de loi que nous examinons aujourd’hui s’appuient sur ces recommandations. Notre groupe soutient la philosophie et les principaux axes de la réforme proposée au travers de ces trois textes, et d’abord l’assouplissement du calendrier d’inscription sur les listes électorales, qui offrirait la possibilité à tout électeur de s’inscrire jusqu’à trente jours avant un scrutin.
Cette disposition apparaît nécessaire : actuellement, la révision annuelle de la liste électorale communale oblige à s’inscrire au plus tard le 31 décembre de chaque année pour participer aux scrutins organisés à partir du mois de mars de l’année suivante. Ce calendrier contraignant dissuade certainement un nombre important d’électeurs potentiels de venir aux urnes. Comme la mission d’information l’a souligné, ce calendrier joue un rôle déterminant dans l’éloignement de millions d’électeurs de l’institution électorale. La révision permanente des listes devrait permettre de remédier, de manière significative, même si ce n’est que partiellement, à cette situation.
De même, la création par l’INSEE d’un répertoire électoral unique, dont les listes électorales communales seront extraites, permettra, en garantissant l’unicité de l’inscription, de les rendre plus fiables.
Le remplacement dans chaque commune de la commission électorale par une commission de contrôle chargée de vérifier la régularité des décisions prises par le maire constitue également une avancée. Ces commissions exerceront un contrôle a posteriori et disposeront du pouvoir de saisir le juge d’instance.
Nous sommes également favorables à une meilleure prise en compte de la mobilité résidentielle des électeurs via la réduction de cinq à deux ans de la durée minimale nécessaire à la reconnaissance de la qualité de contribuable local.
Autre mesure positive, la procédure d’inscription d’office, aujourd’hui applicable aux jeunes de dix-huit ans, sera étendue aux personnes qui acquièrent la nationalité française. De même, les jeunes devenant majeurs entre les deux tours d’une élection pourront voter lors du second tour de scrutin.
Nous aurions, pour notre part, préféré que la réforme puisse entrer en vigueur dès les élections de l’année prochaine, mais nous nous rangeons à l’avis éclairé de nos rapporteurs : ils nous ont convaincu qu’il n’était guère possible d’aller plus vite au regard de l’ampleur de la réforme. Ainsi la mise en place d’un répertoire unique nécessitera plusieurs mois.
Mme Elisabeth Pochon, rapporteure. C’est vrai !
M. Marc Dolez. Toutes ces mesures concrètes vont incontestablement dans le bon sens, même si, bien sûr – chacun en conviendra – la réforme proposée ne suffira pas à revitaliser notre démocratie. La désaffection de nos concitoyens envers les élections est en effet un phénomène bien plus profond. Beaucoup de nos concitoyens ne s’inscrivent pas sur les listes électorales et beaucoup d’autres ne se déplacent pas le jour du scrutin parce qu’ils doutent de l’utilité de leur vote. Il s’agit d’un point crucial : ce constat se vérifie désormais à chaque scrutin, à l’exception, probablement, des élections municipales. La crise démocratique que connaît aujourd’hui le pays est telle qu’à l’évidence, la réforme des modalités d’inscription sur les listes électorales ne peut, à elle seule, permettre d’y répondre.
Cependant, cette réforme est de nature à favoriser une meilleure participation aux élections, tout en garantissant la sécurisation du processus électoral. C’est pourquoi le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera pour ces trois propositions de loi.

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Marc
Dolez

Député du Nord (17ème circonscription)

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