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Sécurité sociale : loi de financement 2010

Madame la ministre, mes chers collègues, compte tenu de la situation budgétaire de la sécurité sociale et de l’indigence des mesures contenues dans ce PLFSS pour y remédier, la bonne nouvelle vient du projet de loi de finances rectifié pour 2009, qui prévoit un remboursement de 2 milliards d’euros de la dette de l’État à l’égard de la sécurité sociale, même si, bien sûr, c’est très en deçà de ce que nous sommes en droit d’attendre.
L’ensemble des mesures contenues dans ce PLFSS est à la fois insuffisant et injuste.
Si nous nous réjouissons que l’exonération de charges sociales dont bénéficient les retraites chapeau soit désormais plafonnée pour les rentes supérieures à huit fois le plafond de la sécurité sociale, nous regrettons qu’un dispositif bien plus équitable de taxation au premier euro n’ait pas été retenu. Certes, vous avez maintenu la suppression du droit à l’image collective des sportifs professionnels en aménageant son application et introduit la mise à contribution des appels téléphoniques surtaxés dans le cadre des jeux télévisés. Mais au-delà de ces quelques mesurettes, vous ne vous attaquez toujours pas frontalement aux niches fiscales et sociales, dont le produit se chiffre, vous le savez, en dizaines de milliards d’euros. Vous refusez obstinément de mobiliser de nouvelles recettes, mettant ainsi en péril l’ensemble de notre système solidaire de protection sociale. Pire, vous invitez l’ACOSS à emprunter 35 milliards d’euros sur les marchés financiers alors qu’il suffirait de supprimer une partie des exonérations de cotisations sociales patronales, comme nous vous le proposions – car nous faisons des propositions –, pour récupérer plus de 20 milliards d’euros.
Mais vous préférez porter atteinte aux droits de nos concitoyens.
En premier lieu, c’est la scandaleuse remise en cause de la majoration de durée d’assurance accordée aux femmes pour le calcul de leur retraite. Je rappelle que les pensions de retraite des femmes sont en moyenne inférieures de 38 % à celles des hommes en raison des discriminations multiples dont elles sont victimes sur le marché du travail, en termes de traitement salarial comme de déroulement de carrière.
En deuxième lieu, vous augmentez le forfait hospitalier et décidez de nouveaux déremboursements de médicaments.
De plus, comme l’an passé, la nouvelle mise à contribution des complémentaires ne manquera pas de se répercuter sur les cotisations de leurs assurés. D’ailleurs, elles l’annoncent déjà.
Je rappelle aussi que vous avez intégré au forceps dans le projet de loi de finances la fiscalisation des indemnités journalières d’accidents du travail.
Nous sommes profondément choqués de votre politique à géométrie variable, car non seulement aucune mesure sérieuse n’est proposée en matière de recettes, mais vous n’avez pas les mêmes exigences à l’égard du secteur économique privé et des plus aisés qu’à l’égard des assurés sociaux, dont le reste à charge ne cesse d’augmenter au point qu’ils sont de plus en plus nombreux à renoncer aux soins.
Une telle politique va de pair avec l’organisation de l’offre hospitalière que vous préconisez. Certes, vous avez accepté de reporter la convergence tarifaire et permis à la Cour des comptes, comme les députés du groupe GDR le demandaient, de contrôler les établissements de santé privés et les organismes médicosociaux. Mais au moment où les qualifications et le savoir-faire des personnels des hôpitaux publics sont indispensables pour permettre à tous d’être soignés, notamment en cette période d’épidémie de grippe A H1N1, l’assistance publique des hôpitaux de Paris, asphyxiée financièrement, s’apprête à supprimer plus de 1 000 postes, dont 150 postes de médecins ! C’est une véritable aberration, comme d’ailleurs la fermeture du service de réanimation médicale de l’hôpital Ambroise Paré de Boulogne, qui accueillait 8 000 patients par an et affichait un taux d’occupation de 95 % : cette fermeture supprime des lits et conduit au regroupement dangereux, dans un même service, de patients fragiles sortant du bloc opératoire et de patients souffrant d’affections diverses, notamment respiratoires aiguës, éventuellement porteurs d’agents infectieux.
Plusieurs domaines d’intervention financés par l’assurance maladie sont sinistrés ; les crédits pour les bonnes pratiques – réseaux de santé, maisons de santé, égalité territoriale d’accès aux soins – sont en baisse. De plus, vous poursuivez la réduction de l’offre de soins de proximité en l’opposant aux pôles d’excellence, au mépris des besoins de nos concitoyens.
Or il n’y a pas lieu d’opposer pôles d’excellence et hôpitaux de proximité : il faut tenir tous les bouts de la chaîne et travailler à tous les étages pour répondre à tous les besoins de toute la population.
Le PLFSS pour 2010 montre, une fois de plus, votre incapacité à proposer une politique publique de santé accessible et de qualité pour tous. Pour ces raisons, nous ne voterons pas le texte issu de la CMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
 

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Jacqueline
Fraysse

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