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PLF 2012 : Médias, livre et industries culturelles

En raison de l’annonce d’un nouveau plan d’austérité par le Premier ministre à midi le 7 novembre, Marie-George Buffet a décidé, au nom des député-e-s communistes, républicains et citoyens, de ne pas prendre part au vote du budget média. Il n’est en effet pas concevable de s’exprimer sur un texte qui vient d’être annoncé caduc, comme si rien ne s’était passé.
Aussi, vous trouverez ci-dessous le rappel au règlement dans lequel Marie-George Buffet explique les raisons pour lesquelles elle ne prendra pas part au vote. Elle a, à la suite de cette intervention, quitté l’hémicycle. Vous trouverez également ci-après, pour information, l’intervention qu’elle avait prévue de prononcer concernant le budget médias.
Rappel au règlement sur le budget média
Monsieur le président, je souhaite faire un rappel au règlement en application de l’article 58, alinéa 1, du règlement de notre assemblée.
Le Premier ministre a annoncé ce midi un nouveau plan d’austérité qui concernera sans nul doute le ministère de la culture. Or nous sommes ici rassemblés, comme si rien ne s’était passé, pour voter un budget dont on sait d’ores et déjà qu’il est caduc. C’est le Premier ministre lui-même qui l’a dit à tous les Français et Françaises.
Nous avions déjà dénoncé cette mascarade lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette situation n’est pas acceptable. Vous voulez nous faire plancher sur un texte dépassé.
Pour ce qui est de la culture, il y avait pourtant matière à débattre. Je m’apprêtais à dénoncer l’atteinte au pluralisme et à la démocratie que constitue la réforme des aides à la presse. Je m’apprêtais à réitérer mon soutien aux salariés des journaux menacés de fermeture. Je m’apprêtais à demander que l’on rapproche RFI de Radio France, France 24 de France Télévisions et que l’on rende sa liberté à TV5.
Mais la farce a assez duré. Il faut suspendre la séance et l’examen du budget dans son ensemble jusqu’à ce que soit présenté un texte sur une base réelle.
Aussi, au nom des députés communistes, républicains et citoyens, j’annonce que je ne prendrai pas part à ce débat, ni au vote, et j’appelle mes collègues à faire de même, afin d’assumer nos responsabilités face à nos compatriotes.
Projet d’intervention en séance sur le budget média (non prononcé)
Mesdames, messieurs,
Il y a bientôt 3 ans, le président de la République concluait les Etats généraux de la presse en ces termes : « il y a peu d’investissements aussi nécessaires que celui que celui que nous sommes en train d’engager aujourd’hui : parce qu’une presse libre, pluraliste et indépendante est l’un des biens les plus précieux et les plus utiles pour notre démocratie comme pour chacun d’entre nous. »
Mais on le voit une fois encore, les promesses ont été contredites par la politique mise en place. De nombreux titres sont aujourd’hui menacés.
Je voudrais à cet égard réitérer mon soutien aux salariés du journal France Soir menacés de licenciements et à ceux de La Tribune qui vivent une période également difficile. Je réitère aussi mon soutien à tous les salariés des imprimeries et de la diffusion qui voient leurs sorts liés à ces journaux et à l’avenir incertain du système mutualiste dont cette majorité a organisé la casse en juillet dernier. C’est le pluralisme de la presse et donc la démocratie qui sont visés.
La question des aides à la presse est, dans ce contexte, d’une singulière acuité. Le programme presse perd 9 % de ses crédits, soit près de 40 M° d’euros. Le portage, qui était présenté comme la réponse ultime à la crise, perd cette année 23 M°, tandis que les exonérations de cotisations patronales pour les journaux gratuits progressent d’un million d’euros !
L’Etat consacre de l’argent à la presse, c’est vrai. Les aides accordées à la SNCF et à la Poste restent à peu près stables à un peu plus de 110 M° d’euros, au bénéfice notamment de certaines publications qui sont de véritables brochures publicitaires ! Mais les aides au pluralisme, elles, restent stables à un niveau dérisoire : 12 M° sur 385 M° du programme presse, soit à peine 3 % des crédits.
L’aide à la modernisation de l’outil de travail de la presse d’information politique et générale, quant à elle, diminue. A périmètre constant, la création du Fonds d’aide stratégique pour le développement de la presse a été l’occasion de supprimer 7 M° de crédits, auxquels s’ajoutent 5 M° au titre de la modernisation des diffuseurs.
Toute cela témoigne d’une chose : alors que la légitimité d’une intervention de l’Etat pour soutenir la presse réside avant tout dans la défense du pluralisme et dans la promotion de la lecture, les crédits qu’il engage à ce titre sont dérisoires et en diminution.
A l’inverse, les titres qui ont accès à la publicité perçoivent des sommes plus importantes et croissantes ! Dans ce budget, dans la droite ligne du rapport Cardoso, l’argent va à l’argent.
La situation de l’audiovisuel public n’est guère plus réjouissante. Le projet de COM de France-Télévisions est au mieux, peu clair et imprécis, au pire, irréaliste et porteur d’une diminution de la qualité du service public. Ce n’est pas en réduisant le nombre de personnels et en dégradant leurs conditions de travail que l’on permettra aux chaînes de trouver de nouveaux publics.
Il serait plus utile de se pencher sur la manière dont l’entreprise utilise son outil de production, sur la manière dont sont passés de coûteux contrats avec les producteurs privés pour l’achat de programmes de divertissement de mauvaise qualité, au détriment de la création.
Pour développer le service public, France-Télévisions a aussi besoin de nouvelles recettes :
• L’Etat doit de toute urgence renoncer à son projet de suppression totale de la publicité et garantir à France-Télévisions qu’il compensera la totalité des sommes dont Bruxelles exigera le remboursement une fois la nouvelle taxe remise en cause.
• Les créations de l’entreprise doivent être mieux valorisées par une meilleure assise de ses droits de propriété et une meilleure gestion de ce patrimoine.
• Enfin, la contribution audiovisuelle doit être rehaussée et calculée en fonction des revenus des contributeurs.
Je souhaiterais insister également sur la situation de l’audiovisuelle extérieure de la France. Le départ de Christine Ockrent n’a en rien résolu la crise actuelle et ne le pouvait, de toute manière, en aucun cas. Il faut le dire clairement : le projet est mauvais et les moyens de sa mise en place totalement inadaptés.
Il est temps d’arrêter ce projet d’audiovisuelle extérieure. C’est un échec ! A l’inverse, il serait positif de rapprocher RFI de Radio-France, France 24 de France-TV et de rendre son autonomie à TV5. Cette proposition ressort d’ailleurs nettement des réflexions de la mission d’information qui a examiné ce sujet.
Comme souvent, les mesures prises contre les salariés, les statuts, sont autant de mesures prises contre la qualité du service public, avec tout ce que cela implique dans ce domaine pour le droit à l’information.
Parce qu’il organise et accompagne une dégradation des conditions de travail des personnels et une casse du service public, ce budget ne peut pas nous convenir. Cela est d’autant plus grave que se trouvent en toile de fond la remise en cause du pluralisme de la presse et de la construction de la citoyenneté.
Aussi, ce budget constitue une menace pour les principes démocratiques que nous défendons. Il n’aura pas le soutien des députés communistes, républicains et du PG.

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Marie-George
Buffet

Députée de Seine-Saint-Denis (4ème circonscription)

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