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Pt contrat de génération

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, monsieur le ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage, la situation de l’emploi dans notre pays est catastrophique. Elle l’est davantage encore pour les jeunes et les seniors.
Le chômage des jeunes touche un quart des moins de vingt-cinq ans présents sur le marché du travail. Celui des plus de cinquante ans est passé de 5 à 7 % entre 2007 et aujourd’hui.
Non seulement la précédente majorité ne s’était guère souciée des questions d’emploi, mais sa réforme des retraites – une réforme dont on sait maintenant qu’elle n’a rien résolu – pousse vers la pauvreté et la précarité de plus en plus de seniors.
Face à la gravité de la situation, nous croyons légitime de rassembler les efforts et, de ce point de vue, nous nous félicitons que les organisations syndicales et patronales aient pu parvenir à un accord national interprofessionnel signé par tous, dont ce projet de loi est la traduction législative.
Les objectifs de ce texte – favoriser l’emploi des jeunes et leur insertion durable dans l’entreprise, embaucher et maintenir les seniors en activité, transmettre des savoirs – sont louables.
Le dispositif prévu parviendra-t-il à les atteindre ? Si nous le souhaitons, nous restons néanmoins très interrogatifs quant à la méthode.
En effet, la multiplication des aides publiques aux entreprises au nom de la compétitivité et des créations d’emplois, que vous réduisez au seul coût du travail – comprenez le salaire et les cotisations sociales –, sans jamais parler du coût du capital, autrement dit du coût des dividendes versés aux actionnaires, qui ont plus que doublé ces dix dernières années au détriment des salaires et de l’investissement, a montré ses limites.
Ainsi, le dispositif des contrats de génération, après celui des emplois d’avenir, crée de nouvelles aides pour les entreprises, qui viennent s’ajouter aux dispositifs existants. Tant et si bien qu’un jeune embauché au SMIC sera subventionné pendant trois ans à hauteur d’un tiers de son salaire brut, ce qui, autrement dit, correspond à la prise en charge par l’État d’une année entière sur trois ans de salaire au SMIC.
Vous comprendrez qu’à ce niveau de dépense publique, qui confine à l’assistanat, nous ayons quelques exigences en termes de contreparties.
C’est donc sur ce point que nous nous attacherons à améliorer ce texte.
Au demeurant, lier l’emploi des jeunes et des seniors par un contrat de génération via des accords collectifs ou des plans d’action élaborés à partir de diagnostics sur la situation de l’emploi dans les entreprises est une bonne démarche.
Encore faut-il que les engagements que doivent comporter ces accords ne se résument pas uniquement à un objectif chiffré de création d’emplois, mais qu’ils se concrétisent et qu’ils soient porteurs d’avancées significatives pour l’avenir.
Il ne s’agit pas seulement d’embaucher des jeunes ou de maintenir dans l’emploi des seniors, mais également d’améliorer les conditions de travail, notamment pour les salariés âgés, de proposer des emplois durables et de qualité, de former et de transmettre des savoirs à la génération montante.
Or, en matière qualitative, la commission n’a adopté qu’une seule avancée tangible : le fait que les jeunes doivent être recrutés en CDI – ce qui n’est pas un détail.
Les modalités d’intégration et d’accompagnement des jeunes, l’anticipation des évolutions professionnelles et de gestion des âges, le développement de la coopération intergénérationnelle et l’aménagement des fins de carrières n’engagent en réalité que très faiblement les entreprises.
C’est pourquoi nous souhaitons voir introduire des dispositions plus contraignantes, notamment pour les jeunes, une démarche de formation des moins qualifiés et la possibilité pour eux d’acquérir une qualification ou une certification professionnelle indispensable à leur insertion durable.
Quant à la volonté de maintenir les seniors dans l’emploi, elle ne sera possible qu’avec la mise en œuvre de mesures de prévention de la pénibilité et d’amélioration des conditions de travail.
Il s’agit également de réduire la précarité des salariés, faute de quoi on ne ferait que déplacer le problème en augmentant, sous prétexte de réduire le chômage, le nombre de travailleurs pauvres. C’est pourquoi nous posons l’exigence d’une rémunération valorisante proche du salaire médian.
Nous avons par ailleurs formulé plusieurs propositions qui tendent à rendre plus contraignantes certaines obligations incombant aux entreprises, afin que les contrats de génération ne soient pas seulement un affichage de bonne volonté, dont les entreprises feraient ce qu’elles voudraient, mais une réelle avancée.
Ce texte va donc dans le bon sens. Il doit cependant être encore amélioré. Nous nous y attacherons.
Nous avons apprécié l’esprit de concertation manifesté par le ministre. Nous espérons que le même esprit présidera à l’examen de nos amendements.

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Jacqueline
Fraysse

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