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Création de points d’accueil pour soins immédiats

À peine déposée, déjà réécrite : la proposition de loi du groupe MODEM relative à la création de PASI, que nous examinons aujourd’hui, a connu des changements d’ampleur au stade de la commission. En raison d’un amendement du rapporteur procédant à une nouvelle rédaction du dispositif, nous nous prononçons sur une version différente de la proposition de loi d’origine.

Ce texte prévoyait initialement de permettre, après autorisation des ARS, la création de PASI au sein des établissements de santé afin de délivrer des soins ne relevant pas de la médecine d’urgence. Il s’agissait donc de créer un accès parallèle aux urgences, dont le fonctionnement serait assuré par des médecins généralistes.

En commission, le texte a été révisé pour inclure ces points d’accueil dans les CPTS et les PTS, des dispositifs qui sont à la main des médecins libéraux et dont nous doutons fortement de l’efficacité. Sous cette réserve, ces points d’accueil pourraient alors faire l’objet d’une labellisation par les ARS pour une durée de cinq ans.

Si la première version de ce texte nous paraissait hasardeuse à plusieurs titres, la version réécrite nous semble alambiquée et n’apporte aucune réponse nouvelle en matière d’accès aux soins.

Elle est hasardeuse car elle part d’un diagnostic très discutable des difficultés que connaît notre système de santé. Alors que le nombre de passages aux urgences a explosé au cours des dernières années, en raison notamment de la désertification médicale, vous laissez entendre qu’un nombre important de passages injustifiés à l’hôpital, de l’ordre de 20 %, pourrait être pris en charge autrement. Or une étude parue en octobre 2019 met à mal le mythe des passages abusifs aux urgences, auxquelles il n’est fait un recours inapproprié que dans 6 % des cas. Ce texte passe surtout sous silence les causes profondes du recours massif aux urgences hospitalières : le vieillissement de la population d’une part et, de l’autre, l’augmentation des pathologies chroniques.

Hasardeuse, votre proposition de loi l’est aussi car elle pourrait induire une réduction du périmètre d’intervention des services d’urgence et, par conséquent, justifier la diminution de leurs moyens au moment même où le personnel hospitalier se mobilise partout dans le pays pour sauver l’hôpital public. À cet égard, le plan annoncé par le Gouvernement la semaine dernière rate sa cible, et l’enveloppe de 300 millions d’euros fléchée en direction des hôpitaux en 2020 est largement insuffisante pour faire face aux besoins.

Enfin, nous craignons que votre texte renforce la confusion entre le public et le privé puisque vous ouvrez la labellisation de PASI aux établissements privés autres que ceux participant au service public hospitalier.

Selon cette logique, la prise en charge des assurés pourrait être réalisée par des cliniques commerciales qui y verraient une occasion supplémentaire de disposer d’une porte d’entrée en hospitalisation pour les patients les plus solvables.

Les modifications apportées en commission n’ont pas levé les réserves que nous avons sur cette proposition de loi. Vous faites le pari supplémentaire que les médecins libéraux s’organiseront dans le cadre de regroupements au niveau territorial pour prendre en charge les soins non programmés, sans garantie en termes de résultats. En définitive, nous peinons à percevoir quels sont les apports concrets de ce texte au regard des dispositifs existants.

Les solutions pour améliorer l’accès aux soins de nos concitoyens sont connues : renforcement et déploiement des maisons médicales de garde ; ouverture de lits d’hospitalisation pour soulager les urgences ; augmentation globale du budget hospitalier de 4 %, comme le réclament les personnels hospitaliers. Ces moyens nouveaux pourraient permettre de créer les postes qui font tant défaut dans les dernières annonces du Gouvernement.

Dans l’attente d’engagements financiers d’ampleur en faveur de l’hôpital public de la part de l’exécutif, nous voyons le dispositif proposé comme un simple palliatif qui ne répond pas au problème d’accès aux soins. C’est pourquoi les députés communistes voteront contre ce texte.

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Stéphane
Peu

Député de Seine-Saint-Denis (2ème circonscription)

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