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Question à la Ministre sur la situation des hôpitaux

Madame la ministre, depuis plusieurs mois, nous vous interpellons sur la situation dramatique des hôpitaux de notre pays. Vos réponses nous ont montré que vous n’aviez pas pris la mesure de la crise profonde traversée par les établissements et leurs personnels. Vous nous dites que tout va bien, mais non, madame la ministre, tout ne va pas bien, tout va mal. Plus de cent personnes en ont témoigné ici la semaine dernière, à l’invitation de notre groupe. Ils ont relayé l’appel d’urgence de milliers de soignants dans tout le pays. Madame la ministre, il est plus que temps d’entendre cette souffrance qui s’exprime.
Médecins, infirmières, aides-soignantes, chacun a pu expliquer à quel point le malaise était profond dans les hôpitaux. Le budget de la sécurité sociale pour 2018, jugé calamiteux, n’arrange rien ; bien au contraire, il aggrave cette situation. Les salariés sont épuisés et le nombre de suicides s’accroît malheureusement. Les plans d’économies continuent, alors qu’il manque déjà cruellement de personnels, de lits et de matériels, ce qui met en danger les soignants comme les patients.
Le message d’une infirmière, relayé des dizaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux, m’a interpellé : elle s’adressait à vous pour expliquer qu’elle ne travaillait plus dans un lieu de vie médicalisé, mais dans « une usine d’abattage qui broie l’humanité des vies qu’elle abrite, en pyjama ou en blouse blanche ». Entendez-vous ce désarroi et cette colère ? Ce sentiment de ne plus pouvoir faire de la qualité est partagé par tous les personnels.
Les politiques mises en place depuis plusieurs années ont dévoyé les missions de l’hôpital public, en faisant primer les intérêts économiques au détriment de la qualité du soin. Cela a des conséquences graves pour la santé de nos concitoyens. Cette politique, c’est la mise en danger de l’hôpital public au profit du secteur privé.
Madame la ministre, ma question sera simple : allez-vous enfin changer de politique ou allez-vous poursuivre dans cette voie, seule contre tous ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le député Bruneel, je ne sais pas si j’ai été suffisamment claire, mais je dis bien la même chose que vous. Les hôpitaux vont très mal. J’ai trouvé cette situation en arrivant, qui résulte de quinze années de réformes hospitalières successives et, notamment, de la réforme de la tarificationà l’activité – T2A. Cette dernière, souhaitable à l’époque, a permis de remettre un certain nombre d’établissements dans une perspective plus dynamique, mais elle aboutit aujourd’hui à une déshumanisation des hôpitaux parce qu’elle pousse à faire de la quantité plutôt que de la qualité. Je me suis exprimée dans la presse et dans cet hémicycle pour dire ce que vous dites, à savoir qu’il faut revaloriser la valeur ajoutée de notre hôpital public, qui repose sur l’inconditionnalité de l’accueil, la pertinence et la qualité des soins, et l’engagement des personnels. Cela nécessite des modifications de la tarification.
Il s’agit d’une réforme d’ampleur. Je rappelle que la tarificationà l’activité avait été conçue par une mission dédiée, au sein du ministère de la santé, qui avait travaillé pendant trois ans. Je suis arrivée il y a six mois dans un ministère où rien n’avait été préparé pour une réforme de la tarification. Il faut donc le temps de trouver les leviers et les outils permettant de valoriser la qualité des soins et d’arrêter de tarifer uniquement l’activité, ce qui pousse les hôpitaux à ne plus trouver le sens de leurs missions et les personnels à désespérer.
Ce travail est en cours et des annonces seront faites, mais vous ne pouvez pas dire que je n’ai pas pris la mesure de la gravité de l’état de nos hôpitaux, ne serait-ce que parce que j’y ai passé vingt-cinq ans de ma vie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)

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Alain
Bruneel

Député du Nord (16ème circonscription)

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