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Le déconfinement : quelle mise en oeuvre après une semaine

Mon copain Pierre Dharréville, à qui je demandais où étaient passés les Marcheurs, me disait à l’instant qu’ils étaient partis se dégourdir les jambes : j’espère qu’ils vont retrouver rapidement le chemin de l’hémicycle (Protestations sur les bancs du groupe LaREM) car je trouve que cette absence des membres de la majorité trahit un manque de respect pour notre mission de contrôle. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LT.)

Quelques jours après le début du déconfinement, les soignants de l’hôpital Robert-Debré descendaient dans la rue pour crier leur colère. Ces jours derniers, des soignants de Saint-Étienne et de tous les établissements pris dans l’étau des plans de retour à l’équilibre leur ont emboîté le pas pour crier halte au feu. On a beau traverser la pire crise sanitaire que notre pays ait connu depuis la grippe espagnole, ces plans d’économie, qui se traduisent par des fermetures de lits et l’austérité à tous les étages, continuent de percuter le quotidien de nos hôpitaux. La pression est partout. Dans ma région, les hôpitaux de Flers, de Cherbourg – la liste est longue – ne sont pas épargnés par la crise financière.

S’il est une chose simple que peut faire le ministre, et sans attendre, c’est de notifier à toutes les ARS l’abandon de ces plans de retour à l’équilibre. Le Gouvernement doit sortir d’une ambiguïté que les personnels interprètent comme un coup de poignard dans le dos, alors que l’hôpital est en première ligne dans la lutte contre le coronavirus. Entretenir l’hypocrisie mine la confiance.

Le Président de la République a dû sentir ce vent mauvais : le jour où les hospitaliers de Robert-Debré manifestaient, il organisait l’audition de quelques soignants et la visite médiatisée d’un hôpital – au cours de laquelle il a envoyé promener avec le mépris qu’on lui connaît les infirmières qui l’interpellaient, refusant des médailles – avant de dévoiler un nouveau plan. Emmanuel Macron voulait chevaucher le tigre de la culture : le voilà rattrapée par la bête blessée qu’est l’hôpital. Vous voilà rattrapés par ce grand corps héroïque mais malade que, depuis trois ans, vous préférez dissimuler sous un drap plutôt que le soigner.

Tandis que, pour sauver l’hôpital, on nous promet un « Ségur de la santé » – autre artifice de communication –, le Gouvernement précise les conditions scandaleuses d’attribution de la prime de soins. Les soignants dieppois ne comprennent pas pourquoi, alors qu’ils ont été en première ligne pour accueillir des patients des Hauts-de-France et d’ailleurs, ils ne bénéficieront pas des 1500 euros promis. Vous avez décidé de diviser la communauté hospitalière au moment où il faudrait la rassembler. Il est inacceptable de ne pas traiter de manière égale des soignants dont il est indispensable de revaloriser le pouvoir d’achat.

De la même manière, sitôt après la promesse présidentielle, Olivier Véran nous dit que l’assouplissement des 35 heures à l’hôpital constituera une des réponses, quand il faudrait envisager une véritable revalorisation des métiers et des embauches massives. Si votre Ségur consiste à suppléer aux 800 postes qui manquent aux hôpitaux de Paris en assouplissant les 35 heures, les revalorisations consenties sous la pression étant insuffisantes pour assurer l’attractivité de ces métiers, c’est que vous refusez de soigner vraiment l’héroïque malade. Pendant que vous promettez un Ségur de l’hôpital, la psychiatrie reste l’autre grande oubliée de la crise du coronavirus. On avait annoncé que ce secteur bénéficierait de rattrapages progressifs jusqu’en 2021, mais voilà qu’il n’y a plus de son, plus d’image alors que les besoins sont criants.

Si votre Ségur ne débouche que sur des mots, vous vous planterez et vous planterez le service public de l’hôpital avec vous ! Vous tromperez ces agents et avec eux les Français qui ont applaudi tous les soirs ceux qui étaient à leur chevet. Votre Ségur doit vous permettre de voir ce grand corps héroïque et malade tel qu’il est et d’établir le diagnostic qui permettra de le soigner vraiment. Le tableau clinique montre un PLFSS – projet de loi de financement de la sécurité sociale – prévoyant un serrage de vis de 4 milliards. Autrement dit, la logique des besoins n’a pas pris le pas sur celle de la règle à calcul. Le tableau montre que l’endettement de nos hôpitaux est passé de 32 % en 2002 à 52 % en 2016.

À la lumière des enseignements de cette période exceptionnelle, il vous appartient de prévoir les moyens de réparer l’hôpital public dans le cadre d’une programmation pluriannuelle. Le tour de France des hôpitaux effectué par les parlementaires communistes vous permet de disposer d’un diagnostic partagé avec les soignants qui nous impose de répondre immédiatement aux besoins financiers et humains de l’hôpital public.(Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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