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Explications de vote et scrutins

Déclaration du gouvernement sur le plan de déconfinemement

La franchise étant mère de fraternité, permettez-moi d’être franc : nous ne voterons pas votre plan, car il laisse trop de place aux approximations. Or, face à un tel virus, c’est dangereux. De plus, alors même qu’une deuxième vague arrive, il renvoie le soin d’organiser le déconfinement aux régions, aux élus – aux élus locaux, en particulier –, aux associations, aux chefs d’entreprise, aux enseignants, aux organisateurs des transports.

Vous n’annoncez aucun moyens humains et financiers supplémentaires pour appliquer votre stratégie, que ce soit pour l’éducation nationale, pour le dépistage, pour qu’un maximum de masques soient gratuits pour tous les citoyens. Pis, vous renvoyez même aux Français le soin de les fabriquer eux-mêmes. Il y aura d’un côté le masque haute-couture de LVMH, celui que portera Bernard Arnault et de l’autre celui cousu dans les quartiers, avec beaucoup d’amour et quelques bouts de tissu.

Vous annoncez même que la réussite de votre stratégie reposera sur le civisme des Français. Mais si eux font preuve de civisme, s’ils sont responsables et majeurs, que dira-t-on du rôle et de la responsabilité de l’État ? Comme beaucoup ici, nous regrettons la précipitation et le manque de moyens, qui vous conduisent à proposer un plan imparfait, incomplet et qui, malheureusement, continue de semer le doute.
Nous ne partageons pas votre façon de vous décharger sur les maires et les entreprises de la mise en place de votre plan. Vous invitez, vous incitez, vous encouragez, alors qu’il faudrait édicter des règles, organiser et contrôler. Écoutez les élus ! Écoutez les partenaires sociaux ! Nous partageons le souci de faire avec eux ; mais cela ne signifie pas qu’il faut leur renvoyer la responsabilité de mettre en œuvre votre plan et vos décisions.

Nous partageons votre volonté d’un déconfinement progressif, tant dans le temps qu’à l’échelle du pays, mais cela ne s’improvise pas. Vous avez dû tenir compte de la colère de la population, de sa crainte s’agissant de la réouverture des écoles. Si nous nous félicitons que les lycées ne rouvrent pas tout de suite, nous ne partageons pas votre choix de rouvrir les écoles le 11 mai, sur la base du volontariat et sans moyens supplémentaires. Ceux qui sont au chômage partiel, et touchent donc un salaire partiel, n’auront pas le choix, non plus que ceux qui risquent de perdre leur emploi et sont prêts à tout pour le conserver : ils remettront leurs enfants à l’école. Quant à celles et ceux qui ne veulent pas remettre leurs enfants à l’école, pourront-ils les garder chez eux, sans risquer une sanction ou un licenciement ?

S’agissant de ces situations, que prévoyez-vous ?

Nous vous demandons d’assurer que toutes les conditions de sécurité sanitaire soient réunies, en particulier en y affectant les moyens humains nécessaires, avant de décider d’une date de réouverture des écoles, pour tout le monde et dans toute la France En effet, la République doit garantir les mêmes droits pour tous, à la campagne ou en ville, en métropole ou en outre-mer. L’égalité de tous demeure, même face à un virus.

Nous demandons que chaque citoyen bénéficie d’un minimum de masques gratuits répondant aux normes de sécurité. Nous voulons que les prix des masques soient encadrés : face à un virus mortel, vous ne pouvez pas continuer à protéger les plus riches et à envoyer les Français les plus fragiles, les plus démunis, s’acheter un masque dans les pharmacies. Nous voulons un pilotage de l’État sur les questions de la production du matériel, du pilotage des tests ou des brigades de dépistage. Si, comme vous, nous sommes favorables à la création de ces brigades, nous pensons, contrairement à vous, que l’affectation des personnels dont elles auront besoin pour fonctionner ne peut dépendre du bon vouloir des maires ou des associations locales. Sinon, c’est du bricolage !

De même, comment laisser aux entreprises le soin d’organiser le travail sans donner plus de droits aux salariés et aux syndicats ? Conditions de travail, déplacements, horaires : tout doit être revu pour faire face au risque épidémique. Aujourd’hui, la reprise du travail ne doit plus avoir pour objectif la rentabilité, mais plutôt l’adaptation au risque épidémique. C’est l’occasion de repenser complètement notre modèle économique. Tout le monde est prêt à retravailler, à trouver des solutions ; tout le monde aspire à ce que les enfants retrouvent le chemin de l’école au plus vite. Mais pas à n’importe quel prix, et pas pour faire comme avant.

Nous voulons donner un sens nouveau au travail, à l’effort collectif, à la production de richesses. Nous voulons que le déconfinement soit synonyme de sécurité, de confiance, mais aussi d’espoir. Celui de bâtir un nouveau modèle économique protégeant chaque être humain du virus, préservant nos ressources naturelles, garantissant notre souveraineté et les valeurs de notre République, si fragilisées ces dernières années.

Dans cet esprit, nous avons formulé des propositions tenant compte de la réalité de notre pays, en métropole comme dans les outre-mer, où les inquiétudes sont encore plus fortes. Pour toutes ces raisons, et à l’exception d’un ou deux députés qui s’abstiendront ou voteront en sa faveur, les députés communistes et ultramarins du groupe de la Gauche démocrate et républicaine voteront contre ce plan. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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