Interventions

Explications de vote et scrutins

GPA

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, les deux propositions de loi soumises aujourd’hui à notre approbation entendent affermir le principe de l’interdiction de la gestation pour autrui. En effet, si elle est déjà prévue par notre droit, cette prohibition apparaît de plus en plus fragilisée dans les faits et par l’évolution jurisprudentielle. Cette fragilisation est inacceptable (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants) car qu’est-ce que la GPA sinon la marchandisation du corps ? (Mêmes mouvements.) Il s’agit d’acheter l’utérus d’une femme pour neuf mois afin qu’ensuite l’enfant soit lui-même acheté par des parents !
M. Philippe Gosselin. C’est la circulaire Taubira !
M. André Chassaigne. Bien évidemment, ces enfants ne sont pas responsables des décisions prises par ceux qui les ont voulus. C’est pourquoi nous devons être attentifs à ne pas porter atteinte à leurs droits.
M. Philippe Gosselin. On est d’accord !
M. André Chassaigne. S’agissant du principe même de la gestation pour autrui, les députés du groupe GDR sont clairement convaincus de la nécessité de lutter contre le développement d’un marché des bébés. Faire entrer l’humain dans un processus commercial ne peut que s’avérer mortifère. Je le dis avec gravité : nous ne validerons jamais une telle évolution de notre société, contraire à la dignité humaine (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe Les Républicains) parce que l’être humain n’est pas une chose, qu’il ne peut s’échanger contre monnaie sonnante et trébuchante. (Mêmes mouvements.)
M. Xavier Breton. Ni même gratuitement !
M. André Chassaigne. Certes, nous pouvons entendre la détresse de certains couples, mais nous ne sommes pas prêts à accepter les risques et les dérives engendrés inévitablement par le recours à la GPA pour satisfaire la demande d’avoir un enfant « génétiquement issu de soi ».
En 2010, le rapport de la mission d’information sur la révision des lois de bioéthique avait parfaitement montré que la gestation pour autrui soulève de lourdes interrogations éthiques, et à plusieurs titres : tout d’abord, au regard des risques, physiques ou psychologiques, qu’elle implique de faire prendre à des tiers, mais surtout au regard de l’aliénation et de la marchandisation du corps humain à travers l’exploitation des femmes les plus vulnérables auxquelles elle serait susceptible de conduire (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants) étant donné l’impossibilité de définir un encadrement apte à garantir l’absence de toute dérive.
M. Xavier Breton. Et il y a le problème de la filiation !
M. André Chassaigne. De plus, la légalisation de la gestation pour autrui entraînerait d’importantes répercussions sociales et juridiques.
M. Erwann Binet et M. Pascal Popelin. Mais il n’a jamais été question de la légaliser !
M. André Chassaigne. Ainsi, en ne garantissant ni l’anonymat, ni la gratuité et moins encore la non-patrimonialité du corps humain, la GPA consacrerait un véritable recul de civilisation. Ce n’est pas parce que des États n’ont pas su résister aux pressions de certains groupes qu’il faudrait à notre tour y succomber ! Depuis notamment le Siècle des Lumières, la France a su porter des valeurs profondément humaines en de nombreux champs de la vie sociale…
M. Philippe Gosselin. C’est son honneur et sa grandeur !
M. André Chassaigne. …et si, depuis, certaines d’entre elles ont subi des reculs majeurs, n’en ajoutons pas un autre en matière d’éthique biomédicale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.)
S’agissant d’abord de la proposition de loi ordinaire, nous considérons que notre législation pénale en la matière est insuffisamment dissuasive : sont en effet exclus du champ pénal les démarches effectuées par une personne auprès d’agents ou d’organismes facilitant contre paiement la pratique de la GPA. Par ailleurs, en raison des règles d’application territoriales de la loi pénale, ces peines sont sans effet quand elle est pratiquée à l’étranger et conformément aux lois des pays dans lesquels elle est autorisée.
M. Philippe Gosselin. Très juste !
M. André Chassaigne. Nous partageons donc la volonté de rendre l’interdiction effective. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.) Au-delà de ce texte, nous sommes pleinement favorables à l’élaboration d’une convention internationale interdisant la GPA, dans le prolongement de celles déjà signées pour réprimer la traite des êtres humains et la vente d’enfants. À cet égard, nous sommes inquiets de l’examen, aujourd’hui et demain, par la commission des affaires sociales de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, du rapport Sutter qui préconise la mise en place d’une GPA « altruiste » !
M. Philippe Gosselin. Rapport pourtant déjà repoussé le 15 mars par cette même commission !
M. André Chassaigne. Quant à la proposition de loi visant à constitutionnaliser le principe d’indisponibilité du corps humain, elle ne nous paraît pas opportune. L’indisponibilité du corps humain est un principe solide de notre droit qui découle déjà du préambule de la Constitution ; en outre, nous craignons que cette notion puisse un jour justifier l’interdiction de l’IVG, du don d’organe ou du don de sang. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
En conclusion, les députés du groupe GDR sont fermement opposés à la gestation pour autrui (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) et considèrent nécessaire de légiférer pour assurer l’effectivité de son interdiction. C’est pourquoi ils se prononceront très majoritairement pour la proposition de loi ordinaire et contre la proposition de loi constitutionnelle. (Applaudissements sur les bancs de la Gauche démocrate et républicaine et sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.)

Imprimer cet article

Thématiques :

Pouvoir d’achat Affaires économiques Lois Finances Développement durable Affaires sociales Défense nationale Affaires étrangères Voir toutes les thématiques