Interventions

Budget de l’État

PLF pour 2024 - Mission budgétaire : Enseignement scolaire

C’est avec émotion et gravité que nous abordons l’examen de ce budget, qui revêt une importance capitale. Il s’agit du premier budget de l’État et il est indéniablement l’un des plus stratégiques pour l’avenir de la nation.

Il y a quelques semaines, l’attaque contre une école et l’assassinat de l’un de ses enseignants ont rappelé de manière poignante la pertinence de l’éducation comme rempart contre l’intégrisme, l’obscurantisme et la violence. Les hommes et les femmes qui se consacrent à l’enseignement, souvent dans des conditions exigeantes, jouent un rôle essentiel dans la formation des enfants. Leur dévouement mérite le plus grand respect, une attention soutenue et une protection inébranlable.

Nos pensées vont, bien sûr, aux enseignants, mais elles englobent également l’ensemble de la communauté éducative à laquelle nous exprimons notre plus profonde reconnaissance. Nous devons enfin les écouter lorsqu’ils nous appellent à leur donner les moyens d’agir, lorsqu’ils nous demandent de reconnaître que le pacte enseignant ne saurait rendre la profession plus attractive et que la question des salaires demeure ouverte. Nous leur devons des réponses concrètes et un respect sincère lorsque leurs représentants viennent nous exposer leurs difficultés et celles des élèves.

Ce budget ne répond pas aux enjeux, ce qui explique son rejet en commission des finances. Toutefois, même si le recours au 49.3 viendra balayer cette opposition pourtant majoritaire, entendez nos alertes !

Nous devons nous atteler, collectivement, à construire enfin un budget qui soit en mesure de traduire des choix forts, comme celui de maintenir les postes, en dépit d’une baisse de la démographie scolaire. Or, depuis 2017, 10 000 postes de professeur ont été supprimés. La baisse de la démographie est, certes, un sujet de préoccupation, mais elle devrait plutôt se traduire par une amélioration nette du taux d’encadrement. Je rappelle que la France détient le record du plus grand nombre d’élèves par classe, parmi les pays de l’Union européenne, ce qui est inacceptable.

Nous devons reconsidérer la regrettable décision de supprimer encore 2 500 postes cette année.

Dans le même temps, la crise du recrutement se manifeste par un nombre croissant de postes non pourvus aux concours – 3 100 en 2023 –, ce qui contraint l’éducation nationale à procéder à des recrutements de contractuels. Nous proposons d’instaurer une forme de prérecrutement, à destination d’étudiants de niveau baccalauréat ou bac + 2, qui serait rémunéré, comme cela se faisait il y a quelques décennies. Nous exigeons également un rattrapage, sans condition, des salaires, pour compenser le gel du point d’indice pendant plus d’une dizaine d’années.

Nous attendons des décisions ambitieuses sur le plan de la scolarisation précoce, reconnue comme un atout pour réduire les inégalités. Il est essentiel de permettre aux collectivités territoriales, où qu’elles soient, d’offrir aux enfants des places d’accueil dès l’âge de 2 ans.

Nous insistons également sur la nécessité de promouvoir la mixité sociale dans le système éducatif. L’école publique n’est pas la seule solution mais il est inadmissible que les établissements d’enseignement privé sous contrat, financés en grande partie par des fonds publics – à hauteur de 73 % –, ne soient pas assujettis à des critères de réduction des inégalités, alors qu’ils contribuent significativement à les perpétuer. Notre propos n’est pas de raviver un quelconque débat conflictuel sur l’éducation, mais plutôt d’œuvrer pour le bien de tous les enfants, qu’ils fréquentent une école publique ou privée.

Le groupe GDR-NUPES réclame des mesures éducatives plus vigoureuses en faveur des territoires d’outre-mer, fréquemment plongés dans une crise profonde, réalité qualifiée d’« école en sous-France » par la Fédération syndicale unitaire (FSU). Il est impératif de reconnaître le délaissement de certains de ces territoires, qui entrave directement l’avenir de nos enfants. Les taux de difficultés en lecture, évalués à l’occasion des tests réalisés lors de la journée défense et citoyenneté (JDC), atteignent 51,8 % en Guyane et 55,7 % à Mayotte, bien au-dessus de la moyenne nationale qui s’élève à 11,2 %. De plus, 70 % des écoles des départements et régions d’outre-mer (Drom) sont dépourvues d’équipement informatique. Peut-on espérer un financement adéquat pour remédier à ces situations ? La réponse semble négative.

Les députés du groupe GDR-NUPES attendent beaucoup plus du Gouvernement en matière de politique éducative. De nombreuses raisons existent pour justifier notre opposition à la politique que vous menez, raisons que nous aborderons lors des débats. Je pense en particulier à la réforme en cours du lycée professionnel, qui réduit les heures d’enseignement des élèves, dont ceux issus des milieux populaires qui en ont le plus besoin.

Ces enfants et leurs familles savent, mieux que quiconque, que l’école est la clé de l’amélioration de leur vie. Du niveau primaire aux études supérieures, des filières générales aux filières professionnelles, toutes nos politiques éducatives doivent viser à construire une école qui favorise l’émancipation, brise les barrières sociales et façonne l’avenir de la nation. Ce budget n’étant pas, selon nous, suffisamment dimensionné pour y parvenir, nous nous y opposerons. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

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Soumya
Bourouaha

Députée de Seine-Saint-Denis (4e circonscription)

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