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Pn contentieux du stationnement payant

Le texte qui nous est soumis vise à tirer les conséquences d’une censure du Conseil constitutionnel à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité concernant la contestation des FPS. Le Conseil a en effet jugé inconstitutionnel le fait de subordonner la possibilité de contester une amende à son paiement préalable. Derrière l’aspect technique de cette proposition de loi, c’est le respect de l’un des principes cardinaux de notre régime juridique qui nous occupe : celui du droit au recours.

Bien entendu, la question des contestations abusives et de l’engorgement des autorités administratives traitant ces demandes est un élément qui doit être pris en considération. Pour autant, cet enjeu matériel ne saurait constituer un argument pour limiter le droit du citoyen à contester des décisions prises à son égard.

C’est d’autant moins contestable qu’il faut tenir compte des évolutions intervenues depuis 2018 en ce qui concerne le stationnement payant : le transfert de la compétence vers les collectivités prévu en 2014 par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite Maptam, a également été l’occasion d’opérer la délégation de cette compétence aux opérateurs privés. Dans de nombreuses grandes villes, ce sont désormais des opérateurs privés qui procèdent aux contrôles et aux verbalisations, avec une seule logique : la rentabilité. Plus il y a de verbalisations, plus il y a de profits pour les quelques entreprises, filiales de grands groupes, qui se partagent le marché et qui, disons-le, ne sont pas là pour beurrer les sandwichs !

À l’aide du système de lecture automatisée des plaques d’immatriculation (Lapi), les prunes tombent les unes après les autres, et ce sans aucun discernement, du fait de la lecture automatisée des plaques conjuguée à la recherche de rentabilité des opérateurs privés. Quelqu’un parlait des eaux glacées du calcul égoïste… Résultat : le nombre de verbalisations explose. Entre 2018 et 2022, le nombre des amendes pour stationnement est passé de 7,8 à 13,7 millions, pour atteindre des recettes record de l’ordre de 340 millions d’euros. Il faut reconnaître que c’est du brutal, mais le grisbi est au rendez-vous.

En même temps que celui des verbalisations et des recettes, le nombre des contestations et des annulations explose lui aussi : selon un récent rapport sénatorial, plus d’une contestation sur deux aboutit à une annulation, preuve de l’absence de discernement des agents verbalisateurs, mais aussi de la nécessité de garantir à chacun le droit effectif à contester la verbalisation. Dans ce contexte, la réponse de notre collègue Labaronne ne nous semble pas satisfaisante.

Les exceptions prévues pour certaines situations – le vol ou la destruction du véhicule, l’usurpation de la plaque d’immatriculation, la cession du véhicule, la perception de revenus limités, la détention de la carte mobilité inclusion – et le plafonnement du paiement préalable constituent des mesures très ciblées qui ne permettent pas, selon nous, que le droit effectif au recours soit parfaitement assuré.

Nous contestons le fait que vous répondiez à un problème matériel – celui de l’engorgement de l’autorité qui traite les contestations – par la limitation d’un droit. Les droits fondamentaux ne peuvent jamais être relatifs : ils ne prévoient pas d’obligation de moyens, mais une obligation de résultat ; c’est aux moyens de s’adapter au respect du droit, et non l’inverse. Si engorgement il y a, c’est que les autorités compétentes manquent de moyens pour traiter les contestations. C’est aussi parce que le système, automatisé et offert au privé, constitue une source d’erreurs en trop grand nombre. C’est à cela qu’il faut répondre.

Dans ces conditions, nous ne soutiendrons pas la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui.

(Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES.)

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)

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