Interventions

Discussions générales

Professionnaliser l’enseignement de la danse

La volonté du législateur d’étendre à de nouvelles esthétiques le cadre du diplôme d’État de professeur de danse n’est pas sans précédent. Dès les années 1990, les tentatives d’encadrement institutionnel de la danse hip-hop se sont heurtées à l’opposition et à la mobilisation du secteur, avant d’être abandonnées. Trente ans plus tard, nous voilà de nouveau à examiner une proposition de loi qui, loin de faire consensus comme l’affirment les députées qui en ont pris l’initiative, provoque la plus vive indignation chez un grand nombre de professionnels et pratiquants, comme en témoignent les plus de 10 000 signatures de la pétition en demandant le retrait.
Que ce soit pour le hip-hop, les danses régionales de France ou les danses dites du monde, l’élargissement du champ d’application du DE, prévu à l’article 1er, instaurerait une forme de sélection sociale dans l’accès au titre de professeur de danse, étant donné le coût et la durée d’une telle formation. Or ce sont les classes populaires qui ont fait naître et évoluer ces pratiques culturelles, dans une logique d’accessibilité. L’institutionnalisation de la danse aurait donc pour effet d’en déposséder celles et ceux qui sont à son origine.
De plus, les éventuelles restrictions imposées par ce diplôme contreviendraient ainsi aux engagements de la France en matière de sauvegarde et de respect du patrimoine culturel immatériel, en ce qu’elles imposeraient une institutionnalisation forcée de l’enseignement des danses traditionnelles.
Enfin, nous devons également manifester notre inquiétude vis-à-vis des conséquences de la suppression de la limitation de l’application de la loi de 1989 à la danse classique, à la danse contemporaine et à la danse jazz. L’adoption de la présente proposition de loi pourrait en effet induire une précarisation de l’emploi, résultat d’une concurrence accrue entre animateurs ayant obtenu un certificat de qualification professionnelle et les diplômés d’État.
Pour toutes ces raisons, les députés du groupe GDR-NUPES avaient, dès l’examen du texte en commission, proposé par voie d’amendement la suppression de l’article 1er et la relance d’une vaste concertation avec l’ensemble des professionnels du secteur, laquelle devrait aboutir à la proposition de qualifications professionnelles alternatives au diplôme d’État.
S’agissant de l’article 5, nous sommes favorables au renforcement des conditions d’honorabilité, pour mieux protéger l’ensemble des pratiquants. Nous devons pourtant dénoncer l’inclusion, au sein de celui-ci, des dispositions récemment introduites dans le code pénal et résultant d’une certaine dérive sécuritaire. Tel qu’il est rédigé, l’article 5 comprend, parmi ceux qui justifient le contrôle d’honorabilité, le délit de dissimulation du visage ou celui de participation à une manifestation illicite. Leur inclusion surprend, car elle ne paraît pas justifiée par l’impératif de protéger mineurs et pratiquants d’éventuelles violences sexistes et sexuelles.
L’article 8 prévoit quant à lui une augmentation du montant des amendes infligées en cas de non-respect de l’obligation d’affichage des diplômes ou d’usage frauduleux du titre de professeur de danse, mais cette hausse ne présente aucun effet dissuasif. Nous lui préférons une politique de prévention, qui favoriserait l’accessibilité à la formation professionnelle.
Chers collègues, l’extension du diplôme d’État de professeur de danse à de nouvelles esthétiques ne répond aucunement aux attentes des professionnels. Bien au contraire, il porte atteinte à des pratiques culturelles que nous devons défendre, en raison de leur caractère populaire et accessible à tous. C’est pour ces raisons que le groupe GDR-NUPES votera contre ce texte.

Imprimer cet article

Thématiques :

Pouvoir d’achat Affaires économiques Lois Finances Développement durable Affaires sociales Défense nationale Affaires étrangères Voir toutes les thématiques