Interventions

Discussions générales

Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 - Projet de loi de finances pour 2013

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux.
M. Gaby Charroux. Monsieur le président, mesdames, messieurs, nous entamons la discussion de ce projet de loi de finances dans un contexte économique et social particulièrement sombre. Le chômage a atteint un niveau record. Près de cinq millions de nos concitoyens sont aujourd’hui inscrits à Pôle emploi et, parmi eux, près de 40 % sont au chômage depuis plus d’un an. La part des chômeurs non indemnisés a également augmenté. Ainsi, 58 % des demandeurs d’emploi ne sont plus indemnisés. Au total, ce sont 3,3 millions de nos concitoyens qui vivent en France avec des minima sociaux et plus de 8,5 millions qui vivent avec moins de 964 euros par mois. Cette dégradation est d’ailleurs très palpable. Il ne se passe pas une semaine sans l’annonce de nouveaux plans sociaux. De fait, l’industrie a perdu 21 000 emplois en un an, le bâtiment 12 000 et le tertiaire, lui-même, 6 000. Notre industrie est dans un état critique : 921 sites industriels ont fermé depuis 2009. Le nombre de fermetures de sites a connu, cette année encore, une hausse de 46 %. La situation du marché du travail devrait se dégrader encore davantage puisque, selon la Banque de France, l’économie française, qui stagnait jusque-là, est cette fois entrée elle aussi en récession.
Cette situation est la traduction du marasme économique qui affecte l’ensemble de l’Europe. Nous sommes entrés dans une spirale récessive qui ne touche plus seulement certains pays tels que la Grèce ou l’Irlande, mais également l’Italie et l’Espagne. Dans ces pays, comme dans le nôtre, tous les moteurs de la croissance sont au point mort ; une situation aggravée par les politiques d’austérité qui achèvent de déprimer la demande intérieure au lieu de la soutenir.
C’est à la lumière de ce contexte économique qu’il convient d’examiner le présent projet de loi de programmation et le projet de loi de finances. Nous ne pouvons, en effet, nous en tenir aux critères comptables qui forment, aujourd’hui, le cadre quasi exclusif de discussion de la politique budgétaire.
Votre priorité, monsieur le ministre, est de réduire le poids de la dette dans la richesse nationale. Nous ne contestons pas l’objectif en lui-même, même si nous considérons que les Français ne sont pas comptables de la part de la dette imputable en France à la finance.
M. Marc Dolez. Très bien !
M. Gaby Charroux. Nous ne contestons pas davantage votre volonté de mettre fin à la stratégie d’assèchement des finances publiques poursuivie délibérément, depuis dix ans, au bénéfice des plus aisés et des grandes entreprises. Nous regrettons, toutefois, la restriction des dépenses budgétaires et l’augmentation des charges que subiront nombre de nos concitoyens aux revenus modestes et moyens.
Vous faites de la réduction des déficits l’instrument privilégié de la réduction de la dette au détriment de tout le reste. Or c’est la croissance, nous semble-t-il, qui nous permettra de réduire nos déficits et non la réduction des déficits qui fera advenir, comme par miracle, la croissance.
En vous fixant pour objectif de faire revenir les déficits publics sous la barre des 3 % l’an prochain, vous empruntez une voie risquée. Cet objectif nous paraît difficile à atteindre et, s’il doit l’être, ce sera au risque de plonger, nous le craignons, l’économie française dans la dépression et, au bout du compte, d’accroître encore l’endettement public comme le montrent les exemples de l’Italie, de l’Espagne ou encore de la Grèce, et ce si la croissance n’est pas au rendez-vous attendu – autour de 0,8 % – ce qui obligerait notre pays et notre gouvernement à trouver encore deux ou trois dizaines de milliards d’euros.
Votre projet de loi de programmation prévoit de nouvelles réductions d’effectifs dans la fonction publique – 2 % en moyenne d’ici à 2015 –, de nouvelles coupes dans les dépenses de fonctionnement des ministères – 5 % d’ici à 2015 –, un quasi-gel des investissements, la réduction des concours de l’État aux collectivités locales de 750 millions d’euros par an à compter de l’an prochain… Ces décisions se traduiront, je le crains, par une dégradation des conditions de vie de nos concitoyens et aussi une dégradation des services publics que les efforts consentis en matière d’éducation, de justice ou de sécurité ne suffiront sans doute pas à compenser.
Par ailleurs, les collectivités locales réalisent, aujourd’hui, plus des deux tiers des investissements publics. Elles seront, demain, privées de la possibilité de le faire, avec des conséquences, là encore, très concrètes sur la vie quotidienne de nos concitoyens : baisse de la qualité ou renchérissement du coût des services de santé ou de transport, difficultés accrues sur le terrain des aides sociales... Vous avez décidé d’opter pour la rigueur afin de mieux « préparer l’avenir », soit ! Mais préparer l’avenir, c’est, selon nous, également autre chose. C’est faire de la croissance et de l’emploi les priorités d’action de la gauche. C’est réhabiliter l’impôt en permettant à nos concitoyens d’en voir les fruits dans les dépenses publiques utiles. C’est chercher à réduire évasion et niches fiscales. C’est développer l’investissement public et privé avec l’appui d’un pôle financier public à même de desserrer l’étau des contraintes extérieures. C’est, enfin, donner à l’État, aux collectivités et aux établissements de santé, les moyens de faire face à leurs missions dans l’intérêt de tous.
Vous le comprendrez, nous exprimons, en conséquence, des réserves inquiètes sur le projet de loi de programmation et le projet de loi de finances qui nous sont présentés aujourd’hui.

Imprimer cet article

Gaby
Charroux

Sur le même sujet

Finances

A la Une

Thématiques :

Pouvoir d’achat Affaires économiques Lois Finances Développement durable Affaires sociales Défense nationale Affaires étrangères Voir toutes les thématiques