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Questions au gouvernement

Assurance chômage : ce décret doit être suspendu

Avant toute chose, je voudrais dire nos pensées pour les victimes de l’attaque de la mosquée de Bayonne, pour les habitantes et les habitants de cette ville, pour nos concitoyennes et concitoyens de confession musulmane qui subissent les effets du poison instillé dans le débat public depuis plusieurs semaines.

Madame la ministre du travail, voici quelques mois, vous aviez demandé 1,3 milliard d’économies sur l’indemnisation des chômeurs, ce qui a empêché la conclusion d’un accord. C’est donc vous qui avez pris la main, et vous n’y êtes pas allée de main morte.

Le 1er novembre, votre décret entrera en vigueur. Ce sera une nouvelle atteinte portée aux personnes privées d’emploi, désignées, au fond, comme les coupables d’une situation qu’elles n’ont pas choisie et qui résulte de la désindustrialisation, du sous-investissement dans les services publics, et de ce libre-échangisme sans rivage qui fabrique chaque jour des dégâts sociaux et environnementaux.

Le durcissement des conditions d’accès à l’indemnisation va affecter 700 000 chômeurs alors que vous en annonciez 200 000. Ce seront bientôt moins de 40 % des chômeurs qui seront indemnisés. Les jeunes et les plus fragilisés seront largement touchés, alors que c’est plutôt d’un accompagnement ajusté dont ils auraient besoin.

Mais ce n’est pas tout. Au printemps, un nouveau calcul entrera en vigueur, qui touchera 850 000 entrants, soit une nouvelle remise en cause de droits acquis des salariés, avec des pertes potentielles de plusieurs centaines d’euros par mois. Quatre allocataires sur dix seront touchés. Certains verront leur indemnité passer nettement au-dessous du seuil de pauvreté.

Votre choix, c’est celui de s’attaquer aux chômeurs plutôt qu’au chômage, aux victimes plutôt qu’aux coupables, ces grands actionnaires que vous gratifiez d’exonérations en ribambelle à chaque occasion.
Ce décret doit être suspendu et revu. Quand allez-vous enfin rouvrir le dialogue social à ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes SOC et FI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Pourquoi faisons-nous une réforme de l’assurance chômage, monsieur le député ?

M. Hubert Wulfranc. C’est la suite de la réforme de l’ISF !

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Après les ordonnances Travail, après la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et l’investissement dans la formation continue et l’apprentissage, après l’investissement colossal que nous faisons déjà pour l’insertion par l’économique, le quatrième volet pour lutter contre le chômage et pour l’emploi, à travers le marché du travail, c’est la réforme de l’assurance chômage. Elle vise notamment à réduire la précarité, devenue un mal très important dans notre pays.

(Exclamations sur les bancs des groupes SOC et GDR.)

Le décret dont vous parlez, que je vous invite à relire très attentivement, est paru et constitue le premier volet de la réforme qui entrera en vigueur le 1er novembre. Il prévoit deux droits nouveaux très importants : les salariés qui auront au moins cinq ans d’expérience pourront enfin, s’ils sont un projet de création ou de reprise d’entreprise, ou un projet de reconversion professionnelle, démissionner et être couverts par l’assurance chômage. C’est un droit très attendu par ceux qui ne font pas le métier dont ils ont toujours rêvé, qui en ont assez de leur métier ou qui ont besoin de bouger pour telle ou telle autre raison, et qui était un engagement de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron. Deuxième droit très important : nous prévoyons un filet de sécurité pour les indépendants, qu’ils soient agriculteurs, commerçants, artisans ou microentrepreneurs, qui jusqu’ici n’avaient aucun droit à l’assurance chômage. Et si nous instaurons la règle selon laquelle il faudra avoir travaillé six mois sur deux ans, c’est-à-dire un jour sur quatre, pour avoir droit à l’assurance chômage, au lieu de quatre mois sur vingt-huit mois, c’est que l’on revient à la situation d’avant crise, dans un contexte de dynamique d’emploi. Je vous invite à aller sur le site de Pôle emploi et vous y verrez que, ce matin, il y a plus de 700 000 offres d’emploi. Dès lors, le système doit être protecteur mais aussi incitatif au retour à l’emploi. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Dharréville.

M. Pierre Dharréville. Madame la ministre, il faut évidemment mettre ces chiffres en rapport avec les six millions de chômeurs qui existent dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.) Vous n’avez pas répondu à la question que j’ai posée sur le nombre des chômeurs qui ne seront plus, du coup, indemnisés correctement. (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Selon les calculs de l’UNEDIC sur les incidences du décret du 1er novembre, le nombre de personnes qui seront affectées si elles ne reprennent pas un travail complémentaire sera de 200 000 mais vu le volume d’offres d’emploi aujourd’hui, plus de 700 000 je le répète, je pense que beaucoup vont travailler deux mois de plus pour avoir droit à l’assurance chômage comme avant. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)

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