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Questions au gouvernement

Réforme ferroviaire

Monsieur le Premier ministre, je voudrais revenir sur la question de la réforme ferroviaire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Il y a aujourd’hui, alors que cette réforme arrive en discussion dans cet hémicycle, une grève qui est conduite par des organisations syndicales, CGT et Sud-Rail, qui sont majoritaires chez les cheminots.
M. Étienne Blanc. Une grève irresponsable !
M. André Chassaigne. Je voudrais d’abord dire avec solennité que les mises en cause du droit de grève qui peuvent s’élever chez certains sont contraires à un droit constitutionnel et que le droit de grève dans notre pays doit être respecté, parce qu’il s’agit de nos valeurs républicaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)
M. Jean-Paul Bacquet. On n’est pas obligé de s’en prendre aux locaux du PS !
M. André Chassaigne. Mais je voudrais dire aussi qu’il ne s’agit pas de diaboliser les revendications qui sont portées par les organisations syndicales. Elles ne répondent pas à un intérêt corporatiste, elles répondent à l’intérêt général. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Elles répondent à l’intérêt général, par exemple, quand elles disent qu’il faut dans notre pays un service public ferroviaire unifié et que le texte de loi, tel qu’il est aujourd’hui, ne permet pas de garantir ce service public unifié. Il faut que ce texte puisse évoluer, pour que des verrous empêchent, demain, l’éclatement de ce service public unifié.
Le deuxième point très important qui est d’intérêt général, c’est celui de la dette. Est-ce qu’on peut concevoir une réforme ferroviaire en donnant à la SNCF une dette de plus de 40 milliards ? C’est en fait une dette d’État, qui est le résultat de choix politiques, en particulier le développement du TGV.
Les conséquences de cette dette, ce seront les conflits à la SNCF. Les usagers seront les premières victimes des dysfonctionnements, ainsi que les cheminots, s’agissant de leurs conditions de travail, mais aussi les investissements.
Monsieur le Premier ministre, est-ce que vous vous engagez à ce qu’il puisse y avoir, durant cette discussion, des avancées qui permettent de faire en sorte que nous disposions d’un service public du fer capable de combattre les dysfonctionnements et de répondre aux besoins des usagers ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président Chassaigne, la réforme ferroviaire est nécessaire. Elle est indispensable et ne peut pas attendre. L’irresponsabilité – vous ne l’avez pas demandé – serait de différer ce texte. Le débat commencera donc aujourd’hui à l’Assemblée : c’est la responsabilité du Gouvernement et de la majorité que de mener cette réforme. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)
Elle est attendue par une immense majorité, d’abord, des cheminots. Il s’agit de renforcer, de moderniser notre système ferroviaire, en créant un grand groupe public ferroviaire réunissant la SNCF et RFF.
Cette réforme est au service de la SNCF et de ses agents, mais avant tout du service public et de ses usagers. Oui, bien sûr, il faut avoir une gouvernance claire, un contrôle public fort. Oui, il faut plus d’efficacité, pour une meilleure qualité de service et une baisse des coûts.
La SNCF est un grand service public. Le lien, je veux le rappeler dans ces périodes de commémoration, entre les Français et les cheminots, c’est quelque chose d’important. Il ne faut pas abîmer ce lien. C’est pour cela que la grève, qui, vous avez raison de le rappeler, est un droit légitime, ne doit pas être utilisée sans revendication véritable, sans que les Français en comprennent même le sens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Et je veux saluer ici tous ceux qui, parmi les cheminots, ont permis que le service public fonctionne. Je veux saluer les personnels de l’éducation nationale, mais aussi ceux de la SNCF, qui ont permis que le bac puisse se passer dans de bonnes conditions. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
Et je veux enfin, de la manière la plus claire, monsieur Chassaigne, condamner les violences inacceptables qui ont eu lieu en marge de ces grèves. Si le droit de grève est un droit constitutionnel, la violence n’est pas acceptable. Nous la condamnons, elle donnera lieu à des poursuites devant la justice de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, ainsi que sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
La porte du Gouvernement a toujours été ouverte. Elle le reste et elle le restera. Cela fait dix-huit mois que le Gouvernement, avec Jean-Marc Ayrault et sous ma responsabilité aujourd’hui, travaille. Je veux rendre hommage ici à Frédéric Cuvillier pour son engagement et sa ténacité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ce ministre, homme du Pas-de-Calais et de la terre ouvrière, sait plus que quiconque ce que nous devons au service public et je sais qu’avec lui, ce grand service public sera préservé. Je l’engage avec confiance à continuer le travail qui est le sien, au nom du Gouvernement, pour faire aboutir cette réforme avec la majorité, et, je l’espère, avec vous, monsieur Chassaigne, parce que je connais votre sens des responsabilités.
Il y a bien sûr des inquiétudes, et elles sont légitimes. Nous y avons été très attentifs. Des garanties ont été apportées sur le terrain social, avec un accord signé vendredi par plusieurs organisations représentatives, accord qui répondait aussi aux demandes d’au moins un syndicat qui est aujourd’hui en grève, et vous le savez, monsieur Chassaigne. Ces demandes feront l’objet d’amendements et de discussions tout au long du débat sur ce texte qui débute cet après-midi.
Ces avancées, monsieur Chassaigne, sont le fruit du dialogue mené depuis des mois avec les organisations syndicales, afin d’apporter les garanties demandées par les cheminots sur la pérennité du service public ferroviaire et sur le renforcement de l’intégration économique et sociale du nouveau groupe ferroviaire public.
Avec cette réforme, non seulement le Gouvernement préserve l’avenir, mais il renforce le service public. Sans mise en œuvre de la réforme, la dérive inéluctable de la dette ferroviaire, vous l’avez dit, pose la question de la pérennité même du système. Elle passerait ainsi de 44 milliards en 2013, Frédéric Cuvillier l’a rappelé, à plus de 80 milliards en 2025. Nous avons trouvé cette situation en arrivant. C’est pourquoi, compte tenu de ce que le Gouvernement a engagé, je considère comme irresponsables certaines – pas toutes – des prises de position de l’opposition, comme celles que nous avons entendues à l’instant. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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